HÊTRAIES
Les divers types de hêtraies en fonction du sol
La hêtraie européenne, bien limitée du point de vue climatique, permet d'aborder l'étude des autres problèmes écologiques relatifs à ces forêts.
Hêtraies de plaine
Les grands massifs de hêtres du nord et de l'ouest du Bassin parisien ont au premier abord un aspect uniforme. Sous la futaie régulière, due en réalité à l'action du forestier, les arbustes sont rares ou absents, à l'exception parfois de quelques houx ou même de l'if, sempervirents. La strate herbacée, rare ou dispersée dans les hêtraies sèches (parfois presque nues), dense quand elle dispose de plus d'humidité édaphique ou atmosphérique, dépend pour une bonne part de la lumière qui franchit la voûte. Aussi comprend-elle, d'une part, quelques espèces toujours vertes, à floraison hivernale ou prévernale (Helleborus fœtidus, Daphne laureola, lierre) ; d'autre part, des espèces accomplissant l'essentiel de leur cycle aérien au premier printemps, avant la feuillaison, parant le sous-bois d'une éphémère splendeur (ce sont surtout des géophytes, dont les réserves souterraines permettent un développement rapide : narcisses, Anemone nemorosa, primevères) ; enfin, dans la lumière verte de la fin de printemps, les vraies plantes d'ombre (géophytes comme les précédentes : Endymion, Phyteuma, méliques, nombreuses autres graminées, mêlées de divers hémicryptophytes : Dryopteris, luzules, Elymus).
En fait, ces espèces ne s'observent pas dans toutes les hêtraies, mais constituent divers groupements, révélateurs des propriétés du sol. Ainsi, dans le Bassin parisien et sur ses marges, on distingue parmi les hêtraies naturelles, ou Fagions :
– le Cephalanthero-Fagion, sur sols calcaires, dont la strate basse contient spécialement Helleborus fœtidus, Carex digitata, Elymus europaeus, Melica nutans, les daphnés, de nombreuses orchidées (céphalanthères...) ;
– l'Asperulo-Fagion, sur sols bruns non ou modérément acides, à humus doux, où abondent Asperula odorata, la fougère femelle, Oxalis acetosella, le millet, le lamier jaune, souvent les ronces ;
– le Luzulo-Fagion, sur sol très acide, podzolique, à humus de type moder, parfaitement typique dans l'Ardenne et souvent dans le Morvan, plus rare aux points les plus arrosés proches de la Manche ; le sous-bois renferme nombre d'espèces montagnardes acidophiles : Luzula albida, L. silvatica, Festuca silvatica, etc. Dans le centre du Bassin parisien, ces mêmes sols peuvent porter une hêtraie qui s'est substituée à la chênaie sessiliflore, dont elle a conservé le tapis herbacé.
À ces divers types fondamentaux correspondent des variantes humides ou sèches, que certaines espèces herbacées permettent également de distinguer.
On voit quels renseignements l'analyse phytosociologique peut donner, d'une part sur le rendement forestier, d'autre part sur la nature du sol.
Hêtraies montagnardes
Comme dans les plaines tempérées nord-atlantiques, le hêtre, à l'étage montagnard humide, occupe des sols très variés. Il est alors accompagné fidèlement par un grand nombre d'espèces herbacées ou sous-ligneuses, rares et souvent absentes en plaine : Dentaria pinnata, Polygonatum verticillatum, Luzula nivea, Prenanthes purpurea. On retrouve cependant sous le couvert de ces hêtraies montagnardes beaucoup d'espèces planitiaires qui permettent de classer de nombreux peuplements dans les trois catégories précédemment définies. Ici encore, le sol autant que le climat déterminent l'existence de nombreuses variantes de hêtraies, inégalement aptes à résister à la concurrence d'autres essences sociales. Ainsi, dans une partie du bassin méditerranéen, depuis les Alpes-Maritimes jusqu'aux Balkans, le hêtre est-il supplanté par l'Ostrya à la limite inférieure de l'étage[...]
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Écrit par
- Marcel BOURNÉRIAS : docteur ès sciences, professeur agrégé en sciences naturelles
Classification
Médias
Autres références
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FORÊTS - La forêt, un milieu naturel riche et diversifié
- Écrit par Yves BASTIEN et Marcel BOURNÉRIAS
- 8 183 mots
- 16 médias
...ceux-ci ne tardent pas à devenir envahissants (si les autres conditions écologiques leur conviennent), ce qui assombrit encore le sous-bois ; peu à peu, la hêtraie remplace la chênaie, et, dans les réserves de Fontainebleau, par exemple, on voit souvent, au sein de la futaie de hêtres, de très vieux chênes...