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HIPPOCRATE DE COS (460-env. 370 av. J.-C.)

L'hippocratisme

Hippocrate a exercé sur la pensée médicale, au cours de plus de vingt siècles, une influence analogue à celle qu'a exercée Aristote sur la pensée philosophique. Parfois contestée, souvent admirée, et plus souvent encore déformée en fonction de ce que l'on voulait y chercher, l'œuvre hippocratique a été un modèle de référence constant pour la médecine occidentale depuis l'Antiquité jusqu'au début du xixe siècle ; de tout temps, deux courants se sont côtoyés et ignorés : à côté d'études précises sur la Collection hippocratique se sont développées d'étranges légendes autour du médecin de Cos.

Pour le prestige d'Hippocrate pendant l'Antiquité, significatif est le jugement d' Oribase, médecin de l'empereur Julien (ive s. apr. J.-C.) : lorsqu'il rassembla, à la demande de l'empereur, les textes des plus excellents médecins pour faire une encyclopédie médicale, son critère de choix resta l'hippocratisme. La diffusion en Occident se fit surtout à travers l'hippocratisme de Galien (iie s. apr. J.-C.), qui fut un grand commentateur des œuvres hippocratiques, et aussi par l'intermédiaire des traductions latines anciennes (Cassiodore recommande dès le vie siècle à ceux qui ne lisent pas le grec de lire Hippocrate et Galien en latin), des traductions arabes (le grand traducteur est Hunayn ibn Ishāq au ixe siècle), relayées par des traductions latines plus récentes faites sur le grec ou sur l'arabe (xie-xiiie s.), traductions qui eurent dans la basse Antiquité et au Moyen Âge une diffusion beaucoup plus large que le texte grec. Tant que l'hippocratisme a été connu à travers Galien, la théorie hippocratique par excellence fut celle des quatre humeurs (sang, phlegme, bile jaune et bile noire, ou atrabile) composant la nature de l'homme à laquelle on ajoutait celle des quatre tempéraments suivant la prédominance de l'une de ces quatre humeurs. Paradoxalement, à la suite de Galien, on attribuait à Hippocrate, comme théorie fondamentale, ce qui était l'œuvre de son disciple Polybe.

La Renaissance marque un retour au texte grec (conservé grâce à Byzance et édité pour la première fois à Venise en 1526) et une connaissance directe d'Hippocrate dont la destinée posthume se séparera de celle de Galien, l'hippocratisme s'opposant même au galénisme et marquant un retour à l'expérience. L'université de Montpellier s'illustra par son hippocratisme. En y expliquant Hippocrate dans le texte grec et en éditant les Aphorismes à Lyon (1532), Rabelais participe à ce retour aux sources, mais les notes manuscrites dans son exemplaire de l'Aldine conservé à la Bibliothèque nationale de Paris sont décevantes et son travail philologique n'est pas comparable à celui des grands médecins érudits du xvie siècle éditeurs de la Collection hippocratique, tels que Cornarius, Mercuriale et surtout Foes. Au xviie siècle, le médecin anglais Thomas Sydenham (surnommé l'« Hippocrate anglais ») retrouve chez Hippocrate le sens de l'observation clinique et décrit les maladies à Londres en s'inspirant de la méthode des médecins des Épidémies. La climatologie hippocratique a eu une influence sur l'histoire des idées du xviiie siècle (Arbuthnot, Montesquieu). Au début du xixe siècle, Hippocrate est encore lu et médité par de grands médecins. Laennec, qui fit sa thèse de médecine sur La Doctrine d'Hippocrate (1804), se réclame de l'empirisme hippocratique contre la doctrine étiologique de son temps (Broussais), et, lors de sa découverte de l'auscultation immédiate, signala, ce que l'on avait oublié, que l'auscultation immédiate était déjà pratiquée par certains médecins hippocratiques. Jusqu'au xixe siècle, l'édition des œuvres hippocratiques[...]

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Écrit par

  • : professeur de grec à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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Hippocrate - Cos - crédits : Rabatti - Domingie/ AKG-images

Hippocrate - Cos

Autres références

  • HIPPOCRATE DE COS, en bref

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    Père de la médecine occidentale, Hippocrate est né en — 460, dans l'île grecque de Cos. Il appartenait à une longue lignée de médecins remontant, selon la légende, à Asclépios (l'Esculape des Latins) et, par lui, au dieu Apollon. On connaît ses principes et son enseignement par les aphorismes dont...

  • ANTIQUITÉ - Naissance de la philosophie

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  • CHIRURGIE

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    Le Corpus hippocratique accorde une place majeure au diagnostic des maladies et à leur explication étiologique. Il est moins disert sur les méthodes thérapeutiques. C'est davantage sur le régime et la diététique que sont fondés les traitements des maladies, ou mieux, leur prévention. Manger peu ou...

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