HIROSHIMA
Hiroshima (1,2 million d'habitants en 2015), chef-lieu du département du même nom, est la principale ville du Chūgoku, la région occidentale de la grande île nippone de Honshū. Le nom d’Hiroshima est connu du monde entier en raison de la destruction atomique de la ville par l’armée américaine le 6 août 1945. Le bombardement a tué instantanément 75 000 personnes, dont un tiers de militaires, le nombre total de morts restant imprécis (de l’ordre de 250 000).
La ville fut construite en 1589 sur l’ordre du seigneur Mōri Terumoto, membre d’une puissante famille de l’ouest du Japon. Elle fit ensuite partie de ce réseau de « villes sous le château » institué par le shōgunat Tokugawa. Son château occupe l’une des îles formées par le delta du fleuve Ōta, d’où son nom d’« île large » (hiroi shima). Sa situation, au fond d’une baie bien abritée et sur l’axe fluvial et routier du San’yōdō reliant le nord du Kyūshū et le centre historique du Japon (Kyōto, Ōsaka) assure à la cité un développement économique et administratif. Elle fut également pendant longtemps le terminus occidental des lignes ferroviaires japonaises.
L’explosion nucléaire de 1945 a effacé des mémoires ce qu’était la ville auparavant : une importante cité-caserne, probablement la plus grande du Japon. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les dirigeants et les militaires américains l’ont prise pour cible. En 1894, l’empereur Meiji, chef des armées selon la Constitution de 1889, en avait fait son centre militaire et c’est de là que sont partis les soldats lors de la première guerre contre la Chine (1894-1895).
Au xxe siècle, sa fonction militaire se renforce. En 1945, une vingtaine d’établissements militaires variés et des usines d’armement occupaient un espace considérable, même au centre de la ville, notamment autour du château. Après le bombardement, les « atomisés » (hibakusha), les rescapés et les réfugiés se sont installés sur ces terrains publics soudainement libérés, créant des bidonvilles qui ont été résorbés avec difficulté dans les années 1970.
Le site deltaïque de la ville est un milieu fragile, mouvant et risqué. Le débit du fleuve, qui est en moyenne de 70 mètres cubes par seconde (m3/s), a atteint le maximum de 7 100 m3/s lors de la crue de 1943 qui inonda 2 100 hectares et douze mille maisons. La ville a grandi de concert avec le delta qu’elle a peu à peu consolidé par des digues, des polders puis des terre-pleins en direction de la mer. Lancé en 1932, le projet de construire un chenal principal à l’ouest pour évacuer les crues et sécuriser la ville butait sur l’ampleur des expropriations. Il se réalise après la destruction atomique de 1945.
La reconstruction de la ville suscita plus d’une trentaine de projets proposés par des urbanistes du monde entier. Le plan de l’architecte corbuséen Tange Kenzō (1946) reprend finalement la trame urbaine antérieure, en y ajoutant uniquement le large boulevard de la Paix (Heiwa ōdōri) – qui coupe transversalement le sud du centre-ville – et, perpendiculairement, le parc de la Paix (1952-1954) avec son musée et ses mémoriaux (12,2 hectares).
De nos jours, outre les fonctions militaires, la ville accueille des activités industrielles et tertiaires importantes (préfecture, université, commerce…). L’ancêtre de l’actuelle entreprise automobile Mazda y est fondée en 1920. Prenant le nom de Tōyō Kōgyō (« Industrie orientale ») en 1927, elle se lance progressivement dans la construction de machines-outils, de triporteurs automobiles et d’armes (fusils). En 1945, elle est le premier employeur de la ville, après l’armée. Puis, après la guerre, la production automobile est mise en œuvre ; Mazda devient le quinzième constructeur mondial, orienté vers l’innovation technologique (moteur rotatif), passant alliance avec Ford dans les années 1970 et désormais[...]
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Écrit par
- Philippe PELLETIER : professeur des Universités
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Médias
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