INDIEN HISTOIRE DE L'OCÉAN
Les transformations contemporaines
Trois grandes séries d'événements, en partie liés, vont au xixe siècle modifier profondément l'équilibre interne de l'océan Indien et redistribuer les foyers d'influence : l'extension de l'économie de plantation et les migrations de population qu'elle entraîne, les transformations de la navigation et des grands courants commerciaux et, enfin, l'expansion de la colonisation européenne.
Plantations et migrations
Dans tous les territoires sous influence européenne, les cultures tropicales, celle du café, mais surtout celle du sucre, se développent considérablement. La hausse du niveau de vie et, par suite, de la consommation en Europe (pour le sucre elle passe en France de 1,5 kg par habitant à 7 kg entre 1822 et 1826), les mesures législatives, notamment l'abaissement des droits d'entrée en Grande-Bretagne, stimulent le marché du sucre au détriment des autres productions. À l'île Maurice, la superficie plantée en canne double entre 1825 et 1831 ; à l'île Bourbon (devenue la Réunion), l'essor est encore plus remarquable. La production de sucre de canne dans l'océan Indien triple entre 1820 et 1845. Le giroflier s'étend à Zanzibar, le thé à Ceylan et dans le nord de l'Inde (Assam), plus tard le caoutchouc en Malaisie. Cette fièvre de culture entraîne de grands besoins de main-d'œuvre.
L'esclavage continue à fournir des bras aux propriétaires de plantations. Un double mouvement porte les captifs africains, par navires européens, vers les îles sucrières (notamment vers Bourbon) et, par les boutres des trafiquants arabes, vers l'Arabie et la Perse.
Malgré les efforts antiesclavagistes et les croisières de la Royal Navy, le trafic persistera bien après sa suppression officielle par le sultan de Zanzibar en 1873. Mais sa condamnation par les puissances, sa répression, sa progressive abolition dans les colonies européennes – l'île Maurice et ses dépendances en 1834, la Réunion en 1848 – obligent les Européens à se tourner vers le recrutement de travailleurs libres. Quelques-uns viendront d'Afrique. Mais jamais ce marché n'aura l'importance de celui des Indes ou de Chine. C'est le début du coolie trade (amorcé en 1829, accru dans les années 1840, réglementé et amplifié entre 1860 et 1970). L'importation de ces « travailleurs sous contrat » modifie profondément le peuplement des rives de l'océan. La « diaspora » indienne vers l'Insulinde, vers les Mascareignes, vers l'Afrique du Sud fait succéder à la première vague des employés agricoles celle des marchands, des avocats ou des médecins. Le mouvement implante une colonie de plus d'un million d'Asiatiques en Afrique orientale et dans les îles, qui s'indianisent. Parallèlement, le mouvement des coolies chinois et les migrations transforment le peuplement de l'archipel indonésien. Ce n'est point seulement la démographie qui en est affectée, mais la civilisation, par l'apport d'habitudes alimentaires, religieuses et culturelles. La naissance de ces sociétés « plurales » sera lourde de conséquences pour le xxe siècle.
Le trafic d'hommes, le commerce des grands produits agricoles et, en retour, des objets européens manufacturés accélèrent les transformations de la navigation dont les progrès favorisent à leur tour la multiplication des échanges.
Navigation et mouvements commerciaux
Les formes anciennes de la navigation s'étaient maintenues jusqu'au milieu du xixe siècle : itinéraires traditionnels des voiliers par la route des îles, affrètement de port en port du country captain naviguant pour son propre compte. Une âpre concurrence opposait les Indiamen américains et anglais.
Dans les années 1840-1860, clippers et vapeurs apportent les transformations décisives. L'apparition[...]
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Écrit par
- André BOURDE : professeur à l'université de Provence, directeur de l'Institut d'art
- Jean-Louis MIÈGE : professeur émérite d'histoire à l'université de Provence
Classification
Médias
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