- 1. La genèse et le développement de l'histoire économique
- 2. L'« ère labroussienne » en France
- 3. Le déclin des années 1970-1980
- 4. La « New Economic History » (ou cliométrie) et son impact limité
- 5. De la « Business History »à l'histoire des techniques
- 6. Vers une histoire sociale, culturelle et politique de l'économie
- 7. Vers une histoire économique du social, de la culture et du politique
- 8. Bibliographie
HISTOIRE (Domaines et champs) Histoire économique
De la « Business History »à l'histoire des techniques
À travers la Business History Review se développe, dans la décennie de 1960, une série d'histoires d'entreprises sous l'influence des travaux de l'historien et économiste américain Alfred D. Chandler Jr. relatifs à la grande entreprise moderne, contemporaine de la seconde industrialisation et perçue à travers ses mutations corrélées entre stratégies et structures d'organisation managériale. Malgré les travaux, datant des années 1950, de Claude Fohlen ou encore de Bertrand Gille et de Jean Bouvier sur la banque au xixe siècle, l'histoire des entreprises manifeste un certain retard en France (la revue Entreprises et histoire n'est créée qu'en 1992), lié notamment à une méfiance durable et réciproque entre chercheurs et chefs d'entreprise et d'un accès souvent malaisé aux archives privées des entreprises. Cependant, ce type d'histoire se développe depuis les années 1980 grâce au soutien de fondations, au mécénat d'entreprises publiques et privées ou à l'appui de comités d'histoire et de revues spécialisées dans certains secteurs (électricité, transports ferroviaires, aluminium...). Même si l'objet est neuf, cette approche micro-économique se heurte à des questions méthodologiques et théoriques parfois anciennes qui traversent plus généralement la discipline historienne. Trois dérives principales en menacent l'essor. D'abord, la tendance à surestimer une histoire strictement internaliste privilégiant, dans les sources, le regard des dirigeants des entreprises sur leurs propres pratiques, une histoire pro domo, somme toute. Ensuite, le risque, conscient ou non, de produire une success story où, de manière tautologique et téléologique, on explique la réussite économique – ou l'échec – de telle entreprise par des facteurs de succès préalablement fixés. Enfin, le danger de saturation et de répétition par la multiplication de monographies qui sous-estiment les évolutions méso-économiques – à l'échelle des branches – et macro-économiques, à l'échelle de la société tout entière.
Cependant, la diversification des champs de recherche dans le temps – par l'exploration, longtemps retardée, du xxe siècle – et dans l'espace repose, en grande partie, sur l'intérêt récent porté, par-delà les entreprises, aux branches et aux secteurs, aux produits et aux marchés, ainsi qu'aux territoires de l'économie. Cet élargissement s'écarte toutefois sensiblement des approches de Chandler, en particulier en renouvelant l'intérêt pour le capitalisme familial, pour les petites et moyennes entreprises ou encore pour les systèmes productifs locaux – appelés parfois « districts industriels » –, avec le souci de s'émanciper d'une vision linéaire et univoque de l'évolution économique qui suivrait le modèle de l'économie américaine dominante. Ainsi, dans les années 1980, nombre d'historiens français, par-delà leur diversité, qu'il s'agisse de Jean Bouvier ou de François Caron, se reconnaissent dans une démarche « révisionniste » – au sens où ils réfutent l'idée du « retard » du capitalisme français comme l'ont longtemps soutenu des auteurs anglo-saxons –, au profit d'une analyse en termes d'évolution à caractère et périodisation spécifiques.
De même, l'histoire des techniques produit des ouvrages féconds, depuis les premiers travaux de David Landes, qu'il s'agisse de l'histoire des inventeurs et des ingénieurs, de celle des écoles et de la formation, des innovations de produits et de procédés, ou encore, de manière plus ambitieuse, de recherches sur les systèmes techniques, dans la lignée des travaux de Bertrand Gille. Mais cette histoire peut se trouver également[...]
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Écrit par
- Michel MARGAIRAZ : professeur d'histoire contemporaine à l'université de Paris-VIII
Classification
Média
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