PAYSAGE HISTOIRE DU
Comment écrit-on l'histoire du paysage ?
L'histoire du paysage présente deux aspects complémentaires. Elle implique la collaboration entre des disciplines différentes pour la mise en commun d'un matériel documentaire susceptible d'intéresser la reconstitution des cadres de vie ; c'est l'étude des paléo-environnements, la géographie historique sous son aspect physique et écologique. Le second aspect met en jeu moins des techniques que des interprétations et vise à démêler la part de l'homme et de la nature sous ses différents aspects dans l'évolution des paysages.
Les disciplines à la collaboration desquelles il faut faire appel dans une histoire des paysages relèvent de trois groupes. Le premier est l' archéologie elle-même à travers une de ses techniques, l'archéologie du paysage rural telle que l'étudie J. Chapelot dans l'article Archéologie du paysage et à laquelle il assigne comme but l'appréhension des processus de « mise en place de l' agrosystème et la régression de l'écosystème ». Le deuxième relève des sciences de la terre ; il est du domaine des géographes physiciens. Le troisième regroupe les études qui portent sur l'écosystème et qui relèvent des sciences naturelles.
Les sciences de la terre utilisent les données archéologiques comme des jalons chronologiques de l'évolution des paysages. Deux secteurs sont particulièrement propices pour saisir l'évolution morphologique récente : les rivages et les montagnes. Le mur d'un aqueduc construit selon les courbes de niveau et retenant les sédiments d'un versant constitue un précieux jalon pour suivre l'évolution de celui-ci. Pour un pédologue, des ruines enfouies dateront les sols qui se sont développés au-dessus. Un four apparent dans la berge actuelle d'une rivière peut être étudié pour son fonctionnement par un historien des techniques, pour les indications que donnent sur les productions agricoles les emballages (amphores) qu'on y produisait ; en archéologie du paysage, une telle structure constitue un jalon pour l'étude des divagations et des alluvionnements de la rivière. Une mosaïque romaine coupée par une faille, un port englouti, un aqueduc au canal gauchi par une flexure sont des marqueurs qui ont enregistré les effets de déformations brutales ou progressives de l'écorce terrestre. La côte est un lieu privilégié pour saisir ces questions. Les déplacements de la ligne de rivage sont en partie liés aux évolutions climatiques à long terme dans la mesure où ils dépendent d'une remontée du niveau marin en rapport avec la fonte des glaces polaires. Mais l'agression de la mer sur le littoral est compensée, en partie ou au-delà, par des apports venant des zones hautes.
Ces jalons doivent faire l'objet d'approches interdisciplinaires. Ainsi, l'effet des séismes sur l'évolution des paysages a toujours marqué les imaginations. Dans le mythe, c'est la catastrophe qui engloutit l'Atlantide. Dans la réalité, la plus célèbre pour l'Antiquité est la catastrophe qui entraîna la disparition de Pompéi. Mais les traces archéologiques de tels mouvements sont toujours difficiles à identifier : il est évident que les séismes ont dû entraîner l'effondrement de bâtiments ; l'attribution de l'effondrement d'un bâtiment découvert en fouille à un séisme est aussi délicate que celle d'un incendie à une invasion !
L'ignorance des problématiques d'une discipline amène à formuler des hypothèses auxquelles le prestige d'une science mal utilisée peut donner une crédibilité. Mohendjo Daro est le site majeur de la civilisation harappéenne qui correspond à la phase d'urbanisation de la vallée de l' Indus entre 2400 et 1800 avant J.-C. Vers cette dernière date, la civilisation semble disparaître. La partie[...]
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Écrit par
- Philippe LEVEAU : professeur à l'université de Provence (Antiquités nationales)
Classification
Média
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