HOKUSAI KATSUSHIKA (1760-1849)
Jamais artiste japonais ne fut à la fois plus admiré en Occident et plus contesté au Japon. Katsushika Hokusai, l'un des plus grands artistes qu'Edo (Tōkyō) ait engendrés, a laissé une œuvre monumentale, souvent inégale, mais d'une diversité sans pareille.
Peintre et dessinateur admirable, grand théoricien, mais très individualiste, perpétuel insatisfait et d'une curiosité toujours en éveil, il s'intéressa à tous les mouvements picturaux sans jamais s'attacher à aucun. Sa vie est une quête émouvante de la perfection ; il est le type même de l'artiste ne vivant que pour son art, et que nulle contingence ne saurait faire dévier du but qu'il poursuit.
Il sut allier, dans un style très personnel, la technique Ukiyo-e à la grande tradition picturale chinoise et japonaise. Il renouvela le monde des formes et des couleurs et contribua grandement à rénover l'art de l'estampe en y introduisant le paysage comme genre indépendant.
Son œuvre, trop originale, força l'admiration de ses contemporains davantage qu'elle ne les séduisit. Cependant, la grande majorité des artistes de son temps subirent, consciemment ou non, son influence.
Une vie solitaire et orgueilleuse
Né en 1760 à Edo sous le nom de Tokitarō, Katsushika Hokusai exerça différents métiers avant d'entrer, à dix-neuf ans, dans l'atelier de Katsukawa Shunshō (1726-1792), l'un des maîtres les plus célèbres de son temps et spécialisé dans les portraits de comédiens. Il y réalisa ses premières estampes en couleurs sous le nom de Shunrō. Il quitta cet atelier quinze ans plus tard parce que, semble-t-il, on avait découvert qu'il travaillait en secret chez Kanō Yūsen. Il poursuivit dès lors seul et librement ses études, s'intéressant aux techniques des écoles traditionnelles Kanō et Tosa, au style Rimpa(école Sōtatsu-Kōrin), à l'esthétique chinoise et même aux principes de la peinture et de la gravure européennes.
On connaît à Hokusai au moins une trentaine de pseudonymes différents. Ce nombre impressionnant de noms de pinceau indique chaque fois un changement d'attitude intellectuelle, de vision et de style, un constant effort de renouvellement.
Paria de l'école Ukiyo-e, il ne connaît ses premiers succès que fort tard, à l'extrême fin du xviiiesiècle, par ses illustrations de romans de Santō Kyōden et de Kyokutei Bakin et par ses surimono(estampes de vœux, de faire-part, etc.) sous le nom de Sōri. Si grande était déjà sa réputation en ce début du xixesiècle qu'il fut convié par le shōgun à participer à un concours de peinture avec Tani Bunchō (1764-1840).
En 1812, il entreprit son premier voyage dans la région de Kyōto et de Nagoya, où il conçut le projet de la fameuse Manga (« croquis au hasard »).
L'étoile du vieux maître allait pâlir devant le succès remporté par le jeune Andō Hiroshige avec la première série des Cinquante-Trois Étapes de la route du Tōkaidō, parue en 1833-1834. La perte dans un incendie de tous ses biens, y compris la prodigieuse documentation amassée au fil des ans, plongea Hokusai dans le dénuement. Solitaire et orgueilleux, refusant de capituler devant le grand âge et les coups du sort, il continua à travailler inlassablement jusqu'à sa mort en 1849 à Edo, laissant une œuvre immense et une multitude d'élèves.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Chantal KOZYREFF : conservatrice des collections Japon, Chine et Corée aux Musées royaux d'art et d'histoire, Bruxelles, gestionnaire des musées d'Extrême-Orient
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
Médias
Autres références
-
GRAVURES D'HOKUSAI - (repères chronologiques)
- Écrit par Alain THOTE
- 131 mots
-
HOKUSAI (1760-1849) (exposition)
- Écrit par Christophe MARQUET
- 930 mots
- 1 média
Du 1er octobre 2014 au 18 janvier 2015, une exposition consacrée à Hokusai (1760-1849), l’un des artistes japonais les plus célèbres en France, s’est tenue aux Galeries nationales du Grand Palais, à Paris. La renommée de Hokusai, qui remonte à la seconde moitié du xixe siècle, doit beaucoup...
-
TRENTE-SIX VUES DU MONT FUJI (Hokusai)
- Écrit par Alain THOTE
- 132 mots
- 1 média
« La Vague » est sans doute la plus célèbre des estampes de la série des Trente-Six Vues du mont Fuji de Katsushika Hokusai (1760-1849), gravée vers 1831. Dans cette planche, le célèbre volcan aux formes parfaitement symétriques, et symbole du Japon, est minuscule et semble comme submergé par...
-
HIROSHIGE ANDŌ (1797-1858)
- Écrit par Chantal KOZYREFF
- 1 329 mots
- 3 médias
Il est certain que, dans ses qualités essentielles, Hiroshige doit beaucoup à Hokusai : la hardiesse des compositions, la stylisation et les raccourcis, la transposition en termes purement japonais de principes de l'esthétique européenne. -
JAPON (Arts et culture) - Les arts
- Écrit par François BERTHIER , François CHASLIN , Encyclopædia Universalis , Nicolas FIÉVÉ , Anne GOSSOT , Chantal KOZYREFF , Hervé LE GOFF , Françoise LEVAILLANT , Daisy LION-GOLDSCHMIDT , Shiori NAKAMA et Madeleine PAUL-DAVID
- 56 170 mots
- 35 médias
...paysage qui fournit à l'estampe son second souffle. Après avoir jusque-là servi de cadre à des scènes, il acquit son autonomie avec le génial Katsushika Hokusai (1760-1849). Le succès éclatant que ce genre remporta alors tenait beaucoup à sa transformation ; en effet il évoquait désormais des sites dans... -
LES ESTAMPES JAPONAISES DANS LES COLLECTIONS PARISIENNES (expositions)
- Écrit par Barthélémy JOBERT
- 1 195 mots
Deux expositions successives, venues s'intégrer aux manifestations organisées en 2008 pour célébrer le cent cinquantième anniversaire de l'établissement des relations franco-nippones, ont permis au public parisien de découvrir, s'il en était encore besoin, les richesses des collections publiques françaises...
-
MANGA
- Écrit par Julien BASTIDE et Arthur BAYON
- 7 041 mots
- 4 médias
La paternité du terme manga dans le champ artistique revient au peintreKatsushika Hokusai (1760-1849), qui l'utilisa au début du xixe siècle pour désigner ses recueils de croquis et de caricatures. Mais, selon le critique Fusanosuke Natsume, le mot était surtout employé auparavant pour décrire...