HOMÉOSTASIE
Claude Bernard, en 1865, dans son Introduction à l'étude de la médecine expérimentale, crée le concept : « Tous les mécanismes vitaux, quelque variés qu'ils soient, n'ont toujours qu'un but, celui de maintenir l'unité des conditions de la vie dans le milieu intérieur. » Mais le mot « homéostasie » a été forgé par W. B. Cannon à partir de deux mots grecs : stasis (« état, position ») et homoios (« égal, semblable à ») ; il définit la stabilisation des états qui permettent les processus biologiques de la vie, telle qu'elle ressort de cette phrase extraite de The Wisdom of the Body : « Les êtres vivants supérieurs constituent un système ouvert présentant de nombreuses relations avec l'environnement. Les modifications de l'environnement déclenchent des réactions dans le système ou l'affectent directement, aboutissant à des perturbations internes du système. De telles perturbations sont normalement maintenues dans des limites étroites parce que des ajustements automatiques, à l'intérieur du système, entrent en action et que de cette façon sont évitées des oscillations amples, les conditions internes étant maintenues à peu près constantes [...]. Les réactions physiologiques coordonnées qui maintiennent la plupart des équilibres dynamiques du corps sont si complexes et si particulières aux organismes vivants qu'il a été suggéré qu'une désignation particulière soit employée pour ces réactions : celle d'homéostasie. »
Le concept d'homéostasie se réfère fondamentalement à la notion d'état stationnaire. La vie peut se définir comme liée à des états entretenus, en dépit de la tendance à l'entropie croissante, grâce à l'« histoire » biologique elle-même. Des mécanismes de régulation cybernétique permettent des essais de formalisation.
Les références du concept d'homéostasie
Les références de ce concept d'homéostasie sont multiples. On peut citer les postulats de la thermodynamique, l'état stationnaire, la finalité cybernétique, l'évolution.
C'est par rapport aux postulats de la thermodynamique que se manifeste la « singularité du vivant ». Par le jeu des dégradations et des régulations, le système biologique apparaît comme une zone irrégulière de surdétermination, où le phénomène banal d'entropie croissante se trouve entraîné dans une dynamique originale et hypercomplexe. « L'équilibre du vivant, c'est un pseudo-équilibre dynamique d'une multitude de déséquilibres naturellement compensés » (J. Piaget).
La notion d'état stationnaire (steady state), ou d'équilibre dynamique, est absolument essentielle. Un exemple simple peut fixer les idées. Soient les deux plateaux d'une balance : sur un plateau on met une tare constante, et sur l'autre un bocal d'eau tel que l'équilibre est obtenu. Si l'on munit le bocal d'un orifice par où il se vide, alors qu'on le remplit à la partie supérieure, on peut réaliser le même équilibre ; mais il est alors « dynamique », parce qu'il résulte du régime stable qui balance entrées et sorties de liquide dans le bocal. Ainsi, un état stationnaire n'implique nullement l'équilibre chimique ou thermodynamique (sauf si le système est fermé ; mais la plupart des systèmes biologiques sont ouverts).
Le système biologique tend à se donner les conditions optimales de son fonctionnement ; et il est difficile, dans cette perspective, d'éviter toute accusation de finalisme. On ne peut pas actuellement parler d'homéostasie sans faire référence à la cybernétique : le mécanisme à rétroaction négative (negative feed back) est essentiel pour dresser un modèle, au moins conceptuel, des phénomènes de régulation dans l'organisme.
La problématique biologique est[...]
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Écrit par
- Jack BAILLET : professeur agrégé à la faculté de médecine de Paris
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