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HOMÈRE (exposition)

Homère fut, selon la formule de Platon, le maître d'école de la Grèce. Dans l’Europe du xxie siècle, il reste, malgré le déclin de l’enseignement des langues anciennes, une autorité. Il faut revenir à cette origine dont nous sommes les héritiers, car, de Il Ritorno d’Ulisse in patria de Monteverdi à Ulysse de Joyce ou au Mépris de Godard, la culture occidentale n’a cessé de trouver dans l’Iliade et l’Odyssée une source d’inspiration. Le rappeler, c’est définir l’ambition de l’exposition consacrée à Homère au musée du Louvre-Lens (27 mars-22 juillet 2019).

Riche de plus de 250 objets, cette exposition rend compte d’une énigme : celle d'un créateur à l’influence immense – dont on ne sait s'il a existé. Elle nous fait découvrir un monument littéraire impressionnant : deux épopées fondatrices qui relèvent non pas de l’écriture mais de l’oralité. Elle fait place à des œuvres créées dans des domaines très différents (peinture, sculpture, musique, cinéma) par des artistes qui empruntent, quitte à le parodier ou à le réinventer, à un univers poétique.

Homère au fil des siècles

<em>Le Rachat du corps d’Hector</em> - crédits : Erich Lessing/ AKG-Images

Le Rachat du corps d’Hector

Cette grande machine, qui s’avance masquée comme le cheval de Troie, a trois objets assez différents : elle s’interroge sur la personnalité d’Homère et sur la nature de son œuvre ; elle souligne l’originalité de deux textes : l’un qui chante la guerre et qui a le goût du sang ; l’autre qui raconte le retour d’Ulysse dans son royaume et dont le récit des aventures permet de définir le héros comme celui qui triomphe des épreuves. L’exposition s’attache surtout à la réception dans les arts figurés des poèmes homériques, de l’Antiquité jusqu’à nos jours. C’est ainsi que, du célèbre peintre de vases Macron à Chagall, en passant par il Baciccio, Rubens, Watteau et Moreau, les épisodes de l’Iliade et de l’Odyssée sont tout à la fois illustrés et réinterprétés, posant la question de « l’homéromanie », cette passion un peu folle qui n’a cessé d’agiter l’Occident.

En ouverture, une assemblée des dieux et une représentation du poète précisent le lien entre le monde divin et l’artiste créateur : il est porteur d’une inspiration qu’il recueille auprès de sa Muse. D’emblée, le visiteur est confronté à un ensemble composite, qui mêle des originaux, des répliques et des copies. Les œuvres antiques sont présentées en compagnie d’œuvres contemporaines. Ce mélange des genres est accentué par le contraste des couleurs : à la blancheur des plâtres ou des marbres s’oppose le rouge sang des créations du temps présent. Une tapisserie de la manufacture des Gobelins représente un extrait du chant IV de l'Iliade ; elle a été tissée en 1994 d'après une œuvre de David Boeno (né en 1955). Face à elle se trouve un tableau de l’Américain Cy Twombly (1928-2011) : Achille se lamentant sur la mort de Patrocle(1962).

La distribution des objets joue avec deux références architecturales : l’hémicycle et le temple. À l’entrée, les gradins d’un odéon attendent le visiteur-auditeur. Au sein de l’exposition, un demi-cercle établit comme une césure entre deux moments dans la visite : celui réservé à l’homme et celui consacré à l’œuvre. Cet espace rappelle celui du débat sur l’agora ; il permet au guide de faire une pause et d’instruire son public. Les différents panneaux reprennent discrètement ce motif de la courbe. Une allée centrale est réservée au culte d’Homère. Cette grande nef est bordée par deux « chapelles latérales » : l’une consacrée à l’Iliade, l’autre à l’Odyssée. En fin de parcours, les poèmes du cycle – ceux qui précèdent la colère d’Achille et ceux qui suivent le retour d’Ulysse – sont présentés comme dans l’abside d’une église.

Le peu d’informations avérées que nous avons[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire ancienne, université de Bourgogne, Dijon

Classification

Média

<em>Le Rachat du corps d’Hector</em> - crédits : Erich Lessing/ AKG-Images

Le Rachat du corps d’Hector