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HOMME ANIMAL (expositions)

La programmation proposée, du 8 avril au 4 juillet 2004, par le réseau des musées de Strasbourg était originale à plus d'un titre. Elle établissait un lien, à travers un même thème traité dans quatre sites différents, sous le titre « Homme Animal. Histoires d'un face à face ». Au musée archéologique était présenté « Un parcours dans les mythes et croyances des mondes anciens », au musée de l'Œuvre Notre-Dame « Créatures fabuleuses de l'imagerie gothique à travers la sculpture, les manuscrits et la gravure », à la galerie Heitz « Six siècles de métamorphoses et de créatures étranges : entre images savantes et caricatures », et au musée d'Art moderne et contemporain « L'artiste du xxe siècle au miroir de l'animal : de Max Ernst à Jörg Immendorff ». L'ensemble du projet résultait du travail en commun des conservateurs de ces musées et de chercheurs de l'Institut d'histoire de l'art de l'université Marc-Bloch à Strasbourg, auquel appartenaient les deux commissaires de cette manifestation, Laurent Baridon et Martial Guedron. Les œuvres sélectionnées, provenant de collections publiques strasbourgeoises ou d'autres musées français et étrangers, illustrent des conceptions élaborées. Peinture, sculpture, gravure, image scientifique ou jouets, les représentations des liens existant entre l'animal et l'homme parlent avant tout de l'humanité, offrant autant de miroirs qui interrogent son identité et sa nature profonde.

Dès la préhistoire, la représentation de l'animal traverse les mythes et les croyances, et ce jusqu'à l'aube du Moyen Âge. Amulettes ou pendeloques, il s'agit de s'approprier les forces animales auxquelles l'homme est confronté. D'Égypte ou de Grèce proviennent bien des figures de l'imagerie occidentale, dont ces hybrides monstrueux que sont les sphinx, centaures et satyres. Avec l'imagerie gothique, qui puise, comme l'imagerie romane avant elle, dans le répertoire issu du monde antique, apparaît un univers d'êtres fantastiques. Omniprésent dans l'univers médiéval, le diable est l'une des créations les plus originales du christianisme : dès le xie siècle, sa silhouette, le plus souvent anthropomorphe, envahit les arts figurés et les manuscrits. La culture du Moyen Âge renoue avec l'idée aristotélicienne d'une communauté des êtres animés. L'imagerie biblique, scripturaire et figurative, contribue à la promotion de l'animal dans l'ordre symbolique, comme l'atteste l'héraldique à partir du xiie siècle. Si les marges à drôleries des manuscrits gothiques témoignent d'une exploitation facétieuse de la présence des animaux, avec le Roman de Renart,le Roman de Fauvelou les fables,c'est leur pouvoir satirique qui s'affirme.

Le ressort de la parodie animalière, ce monde à l'envers où les hommes se conduisent comme des bêtes, apparaît récurrent. La caricature recourt très tôt à ce procédé, dont, en France, l'expression atteint un maximum de violence dégradante à la période révolutionnaire, contre les représentants de la monarchie. Plus fondamentalement, le questionnement portant sur la similitude des apparences de l'homme et de l'animal accompagne la réflexion scientifique jusqu'à nos jours. La physiognomonie de Lavater, puis le darwinisme appliqué aux sociétés modernes donneront lieu à bien des égarements. C'était d'ailleurs une des grandes qualités de cette exposition que d'illustrer l'importance de l'animalomanie si chère au xixe siècle, à travers les œuvres de Cruikshank, Grandville, Gustave Doré, Benjamin Rabier et, dans un registre plus sombre, les Caprices de Goya.

Les collections de Tomi Ungerer, figure emblématique de l’esprit satirique strasbourgeois,[...]

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