- 1. Les multiples approches de la question
- 2. L'Antiquité grecque et romaine
- 3. La répression de l'Église et de l'État : le temps du péché
- 4. Le XIXe siècle aliéniste
- 5. Un siècle de combat
- 6. L'homosexualité féminine longtemps passée sous silence
- 7. La révolution des années 1970
- 8. Normalité contre rébellion
- 9. Fin des discriminations
- 10. Batailles pour une reconnaissance juridique
- 11. Bibliographie
HOMOSEXUALITÉ
Batailles pour une reconnaissance juridique
Cette banalisation du fait homosexuel s'est trouvée d'abord perturbée, et finalement confirmée, par le débat sur un nouveau projet de loi qui visait à donner un statut aux couples non mariés, hétérosexuels ou homosexuels : le Pacs (pace civil de solidarité). Affrontement politique majeur – 120 heures de débats au Parlement en témoignent en 1998-1999 –, la proposition de loi divisa initialement les partis politiques, comme les experts, mais finit par convaincre les Français (70 p. 100 y étaient finalement favorables en 2000). Ce fut en fin de compte une victoire du volontarisme en politique. Et du coup, la tolérance pour l'homosexualité s'est accrue au point de devenir « une manière acceptable de vivre sa sexualité » pour une majorité de Français (et pour plus de 85 p. 100 des jeunes de moins de vingt-quatre ans).
Cette confirmation de la « révolution homosexuelle » que nous offrent les sondages est d'autant plus significative qu'ils suivent tout au long des trente dernières années une courbe en progression constante quant à la tolérance des Français à l'égard des homosexuels. Quatre chiffres, à eux seuls, résument ce mouvement d'ensemble. À une question de la Sofres posée régulièrement durant presque trente ans : l'homosexualité est-elle « une manière acceptable de vivre sa sexualité ? », 24 p. 100 des personnes interrogées répondaient par l'affirmative en 1973, 29 p. 100 en 1981, 41 p. 100 en 1984, 55 p. 100 en 2000. Défendue par Christiane Taubira, alors garde des Sceaux du gouvernement socialiste, la loi du 13 mai 2013 « ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe » a eu le même impact dans la société française.
Cette évolution qui concerne à la fois les conceptions théoriques de l'homosexualité, sa visibilité, son intégration dans le droit et dans les mœurs, son développement culturel et sociétal est en elle-même une évolution totale : une révolution. Entre Stonewall et l'activisme gay contre le sida à travers le monde, entre les premiers textes de Guy Hocquenghem et le vote du Pacs en France, il y a plus qu'un basculement : le monde qui nous entoure a changé.
La formule de reconnaissance juridique ouverte en France par le Pacs s’inscrit d’ailleurs dans une tendance réformatrice libérale apparue auparavant dans les pays d’Europe du Nord (Danemark, Suède, Pays-Bas). Contrairement à la formule française excluant clairement ces effets, certains de ces pays avaient accepté que ces nouveaux régimes de partenariat pour couples (de même sexe ou non, selon les législations) équivalent au mariage et emportent des droits de succession, voire d’adoption pour les partenaires. Depuis lors, la reconnaissance du droit pur et simple au mariage entre homosexuels par les Pays-Bas en 2000, par la Belgique en 2003 et par l’Espagne en 2005 ont relancé le débat. Avec le droit d’adoption (reconnu par la Grande-Bretagne en 2002) et les aménagements de l’autorité parentale par ces lois ou par les tribunaux, c’est toute une conception figée de la famille qui est peu à peu dépassée, où les réflexions autour de la notion d’homoparentalité et des nouvelles manières de former un couple jouent un rôle moteur.
Cette évolution ne se retrouve pas dans tous les pays européens, ni, a fortiori, dans tous les pays du monde. Mais dans les États démocratiques occidentaux, il existe néanmoins un mouvement de fond qui vise à considérer les homosexuels comme des sujets de droits égaux et à reconnaître l'homosexualité comme un choix de vie singulier aussi acceptable qu'un autre. C'est dans cette logique que le traité d'Amsterdam du 2 octobre 1997 a introduit, au titre des principes devant guider les institutions de la Communauté européenne, la lutte contre la discrimination fondée sur[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Frédéric MARTEL : journaliste, écrivain
Classification
Média
Autres références
-
ADOPTION
- Écrit par Pierre MURAT
- 8 894 mots
...l'adoption au cœur du xxe siècle est venu d'une demande croissante des couples stériles, aujourd'hui, en France comme à l'étranger, ce sont les attentes des couples homosexuels en quête d'une reconnaissance institutionnelle de l'« homoparentalité » qui constituent le moteur des principaux... -
AFRO-AMÉRICAIN CINÉMA
- Écrit par Raphaël BASSAN
- 6 876 mots
- 3 médias
Les choses évoluent beaucoup au niveau du langage cinématographique et des nouveaux thèmes abordés, dont l’homosexualité. Noirs, Blancs, métis, membres des groupes LGBT y contribuent. -
BROOKS PHILIP (1953-2003)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 150 mots
Réalisateur et producteur de cinéma. Travaillant en France, il rappelle à la mémoire dans Une journée portée disparue, diffusée sur Arte en 1991, la manifestation d'Algériens à Paris, le 17 octobre 1961. En 1996, il crée sa société de production : Dominant 7. Le choix des sujets abordés témoigne...
-
BUTLER JUDITH (1956- )
- Écrit par Françoise COLLIN
- 1 095 mots
C'est à la lumière de la problématique des(homo)sexualités que se radicalise le questionnement de Judith Butler, jetant le « trouble » dans la définition du genre, trouble qui signale son instabilité à partir du moment où la normativité du désir ne lui sert plus de caution ou de repère. Pour l'auteur,... - Afficher les 44 références