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HOMOSEXUALITÉ

La révolution des années 1970

À travers le monde, l'acte de naissance de la « révolution homosexuelle » porte une date : le 27 juin 1969. Cette nuit-là, à New York, six officiers de police en civil pénètrent à l'intérieur d'un café homosexuel, le Stonewall Inn, au numéro 53 de Christopher Street à Greenwich Village. Descente habituelle, la visite se solde par quelques interpellations de travestis et une fermeture du café, tandis que des clients sont violemment bousculés. Simple routine. Ce soir-là pourtant, les homosexuels réagissent pour la première fois : les renforts de police sont accueillis à coups de briques... et de talons aiguilles. Trois nuits d'émeutes suivent. Pour la première fois, les homosexuels adoptent une attitude offensive. C'est la naissance du to come out of the closet (ou coming out, « sortir du placard »). Cet événement romantique, que l'écrivain américain Edmund White a pu qualifier de « prise de la Bastille » joue encore aujourd'hui un rôle important dans la mémoire collective des homosexuels.

Il serait caricatural de réduire toute l'histoire récente de l'homosexualité à cette date américaine symbolique. Pourtant, c'est bien à la fin des années 1960 ou au tout début des années 1970 que l'histoire bascule pour les homosexuels. Dans la plupart des pays occidentaux, des événements similaires ont lieu. En France, le mouvement homosexuel apparaît en 1971 dans une filiation post-soixante-huitarde évidente, même si les luttes homosexuelles vont suivre dans notre pays un lent processus d'émancipation : après un temps de lutte identitaire centripète, replié sur une réflexion interne, le discours évolue pour se consacrer à la défense des droits de la minorité sur un mode centrifuge quasi syndical. Une évolution qui va prendre dix ans.

Tout au long des années 1970, dans la dynamique de Mai-68 et des revendications « gauchistes » des années Pompidou, la question homosexuelle devient en effet peu à peu un enjeu de société. Dans un premier temps, entre 1971 et 1979, le mouvement fut politiquement situationniste, trotskiste et bientôt maoïste, mais toujours radical et minoritaire. Les luttes se cantonnaient le plus souvent aux groupes de conscience, aux lieux de paroles ou à la découverte, entre soi, de la spécificité homosexuelle.

Un trait spécifique de ce mouvement à cette époque, valable aussi bien en France qu'aux États-Unis, est la proximité du mouvement homosexuel et du mouvement de libération des femmes. Pour s'affirmer les lesbiennes doivent d'ailleurs mener deux combats qu'elles tentent de concilier : un combat féministe pour obtenir la parole en tant que femme, un combat lesbien pour affirmer leurs droits homosexuels. Or, très souvent, les féministes refuseront d'envisager la singularité lesbienne. Cependant, comme le montre l'histoire du mouvement gay français, c'est bel et bien au sein du mouvement des femmes (M.L.F.) que les hommes homosexuels sauront s'affirmer au départ, et trouver des solidarités, avant de voler de leurs propres ailes.

Mais la rupture de 1968-1969 ne se résume pas à un vent de libération qui souffle d'Amérique. Dans les discours politiques de gauche, dans la littérature et la chanson, l'homosexualité cesse également d'être un tabou et se banalise. De nombreux établissements gays se créent. La mode évolue avec les gays et surtout l'image de l'homosexuel se virilise comme les textes clés du sociologue Michael Pollak l'ont bien montré.

Et s'il fallait un exemple de plus à cette « libération en marche », le cinéma des années 1965-1980 en serait une illustration très parlante. De Théorème (1968) de Pasolini à Sebastiane (1975) de Derek Jarman, en passant par Les Damnés (1969), Mort à Venise (1971) et Ludwig (1972) de Visconti, Love (1969)[...]

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