HONG SANG-SOO (1960- )
Depuis 1996, le cadre des films de Hong Sang-soo n’a pratiquement pas changé : un homme, deux femmes (ou l’inverse), de l’alcool, des chambres anonymes, des plages désertes, des villes fantomatiques… Il y a comme du tarot dans ce cinéma : un même jeu de cartes pour d’infinies combinaisons.
Hong Sang-soo a grandi à Séoul (où il est né le 25 octobre 1960) dans le climat pesant de la dictature des années 1960 et 1970. Il se décrit volontiers comme un adolescent introverti, dont la cinéphilie s’est construite autour des films américains diffusés à la télévision. À l’âge de vingt ans, sans réelle vocation, il décide de devenir cinéaste. Après avoir étudié la mise en scène à l’université de Chung-Ang à Séoul, il part pour San Francisco puis Chicago. Là, il suit les cours de l’Art Institute et réalise ses premiers courts-métrages. C’est en y découvrant Journal d’un curé de campagne de Robert Bresson en 1987 que Hong Sang-soo renonce aux essais expérimentaux pour se tourner vers un cinéma narratif.
Lorsqu’il retrouve Séoul dans les années 1990, la Corée a totalement changé. Le processus de démocratisation est en marche, la censure s’assouplit puis disparaît. Le cinéma coréen peut renaître et Hong Sang-soo devenir l’une des figures essentielles de cette nouvelle période.
Variations sur le sentiment amoureux
En 1996, il tourne un premier long-métrage au titre énigmatique : Le Jour où le cochon est tombé dans le puits. Hong Sang-soo y entrecroise les destins d’un médiocre écrivain et d’un représentant de commerce psychologiquement instable. Ces personnages sans charisme errent dans l’existence comme des fantômes. Composé de chapitres astucieusement découpés, le film frappe au contraire par sa rigueur formelle. Sorti dans l’indifférence du public, Le Jour où le cochon est tombé dans le puits reçoit un accueil critique enthousiaste et unanime, ainsi que le prix du meilleur réalisateur au festival de Vancouver et celui du meilleur film à Rotterdam. Hong Sang-soo vient d’imposer la possibilité d’un cinéma coréen d’art et essai. Cependant, Le Jour où le cochon est tombé dans le puits ne sortira en France qu’en 2003, couplé aux deux films suivants : Le Pouvoir de la province de Kangwon (1998) et La Vierge mise à nu par ses prétendants (2000), tous deux présentés à Cannes dans la sélection Un certain regard. Dans un écrin noir et blanc, La Vierge mise à nu… déroule pratiquement le mode d’emploi du cinéma de Hong Sang-soo, avec ses niveaux de lecture variés, son ironie envers les hommes un peu falots et sa fascination pour les femmes distantes et amusées.
Pendant quelques années, Hong Sang-soo va pouvoir travailler dans des structures de production plus solides. C’est avec le producteur français Marin Karmitz qu’il réalise en 2003 TurningGate, une comédie amère sur un homme partagé entre deux femmes, et La femme est l’avenir de l’homme, un brillant chassé-croisé amoureux où passé et présent se mêlent dans les vapeurs d’alcool. Ce film met en scène Yoo Ji-tae, l’une des plus grandes vedettes coréennes du moment. En 2005, Conte de cinéma propose une réflexion sensible sur le métier d’actrice et sur les liens diffus entre les films et la réalité. Il signe aussi la fin de la collaboration du cinéaste avec le producteur français.
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Écrit par
- Adrien GOMBEAUD : journaliste
Classification
Média
Autres références
-
CORÉE - Cinéma
- Écrit par Adrien GOMBEAUD et Charles TESSON
- 3 480 mots
...(2007), Poetry (2010), Burning (2018). Observateur du comportement humain et des relations complexes entre hommes et femmes souvent vouées à l'échec, Hong Sang-soo (né en 1960) est certainement le cinéaste le plus prolifique de sa génération. Tous ses films, qu'il s'agisse de La Province...