HONGRIE
Nom officiel | Hongrie (HU) |
Chef de l'État | Tamás Sulyok (depuis le 5 mars 2024) |
Chef du gouvernement | Viktor Orbán (depuis le 29 mai 2010) |
Capitale | Budapest |
Langue officielle | Hongrois |
Unité monétaire | Forint (HUF) |
Population (estim.) |
9 574 000 (2024) |
Superficie |
93 023 km²
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Les mutations des années 1989-1990
Dans la chaîne des révolutions est-européennes de 1989, la Hongrie fut, après la Pologne, le deuxième maillon. À quel moment exact a-t-elle franchi « le cap » ? Quand a-t-elle cessé d'être un pays de type soviétique ? Impossible de répondre avec précision. Car, pour la Hongrie, le passage à la démocratie s'est effectué à la faveur d'une évolution sans éclats, au moyen de petites étapes dont chacune n'a apporté que des compléments aux innovations précédemment acquises.
Aux origines de cette évolution, deux séries d'événements (pour autant qu'on se limite au paysage national en laissant de côté une troisième série non moins décisive : celle des changements survenus à Moscou sous l'impulsion de Mikhaïl Gorbatchev). La première série remonte aux années soixante-dix, elle est liée au réveil de la société hongroise. L'autre série concerne les structures mêmes du pouvoir communiste, elle se présente comme une crise multiple (de gestion économique, de succession politique et de légitimité idéologique) que le régime ne parvenait plus à surmonter. L'année 1989, marquée par une conjonction d'événements externes, les uns plus favorables que les autres, permit alors à la société hongroise de résoudre la crise du régime communiste en mettant fin à celui-ci.
Le réveil de la société hongroise
Après une longue léthargie due à la défaite de 1956, c'est au cours des années soixante-dix que la société hongroise en est venue à se réactiver. En 1968, seule une poignée d'intellectuels osa élever la voix contre l'invasion de la Tchécoslovaquie voisine. Mais quelques années plus tard, encouragée sans doute par une relative tolérance des autorités, la création intellectuelle a pris ses distances avec l'idéologie officielle. Dans la production littéraire et artistique comme dans les publications touchant à l'histoire ou aux sciences sociales, le choix des thèmes devenait plus libre de même que la manière dont on les traitait : le parler marxiste-léniniste a perdu son monopole (tout en restant prédominant). Les décennies qui séparent 1968 de la crise finale n'ont, certes, pas été exemptes de répressions ni d'intimidations envers les rebelles mais après 1975, année où une tentative maladroite a été faite pour instituer le procès d'un livre-reportage critique sur la condition ouvrière (Salaire aux pièces, de Miklos Haraszti), aucun intellectuel n'a été mis en prison. C'est d'autant plus remarquable que la décennie et demie suivante a vu naître en Hongrie – à Budapest surtout – le samizdat organisé et de plus en plus « politique ». Le public de cette nouvelle littérature oppositionnelle était, certes, restreint, de même que le nombre encore plus limité de ceux qui risquaient leur emploi pour y participer activement (celui qui publiait dans le samizdat – ou qui signait une pétition – perdait vite son poste d'enseignant, de journaliste ou de chercheur) ; le petit monde du samizdat n'en a pas moins apporté une révolution : la fin du contrôle absolu exercé par le pouvoir sur l'opinion publique.
Loin de la capitale, un autre segment de la société hongroise commençait à donner des signes d'impatience : celui des patriotes frustrés. Dans les années soixante, en effet, le rétablissement de la liberté de circulation entre les États communistes avait permis à des centaines de milliers de Hongrois de découvrir leurs parents ethniques – souvent leurs parents au sens littéral – vivant au-delà des frontières, sous administration roumaine, yougoslave ou tchécoslovaque. (L'URSS elle-même, où vivaient pourtant d'autres Hongrois détachés de la mère patrie en 1919, puis en 1944, est restée fermée jusqu'à la fin.) Ces retrouvailles, que les autorités roumaines ont tout fait pour rendre[...]
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Écrit par
- Jean BÉRENGER : professeur émérite à l'université de Paris-IV-Sorbonne
- Lorant CZIGANY : professeur à l'université de Londres (Royaume-uni)
- Albert GYERGYAI : professeur honoraire à la faculté des lettres de Budapest
- Pierre KENDE : directeur de recherche au C.N.R.S.
- Edith LHOMEL : chargée de cours à l'Institut d'études européennes de l'université de Paris-VIII, analyste-rédactrice aux éditions de la Documentation française
- Marie-Claude MAUREL : directrice d'études à l'École des hautes études en sciences sociales
- Fridrun RINNER : professeur des Universités
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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Médias