HONORÉ PHILIPPE HONORÉ dit (1941-2015)
Né le 25 novembre 1941 à Vichy par le hasard de la guerre et de l’exode, Philippe Honoré, dessinateur de presse et illustrateur, a peu connu son père en raison du divorce de ses parents après sa naissance et de la mort accidentelle de celui-ci. En 1949, il vit avec sa mère dans le sud-ouest, à Biarritz, puis à Pau. La faillite de l’épicerie familiale contraint le jeune homme à abandonner l’école. Autodidacte, il admire les dessins de Dubout et, dès l’âge de treize ans, rêve d’être dessinateur. Il débute comme dessinateur industriel quatre ans plus tard à la Société nationale des gaz du Sud-Ouest. Il s’intéresse à la gravure et aux différents supports. La perspective de son incorporation en pleine guerre d’Algérie décide Honoré à mener une grève de la faim qui le rend inapte au service militaire. Cette période forgera sa conscience politique.
Son premier dessin paraît en 1960 dans Sud-Ouest, un journal où quelques années plus tôt avait débuté Jean-Jacques Sempé, un dessinateur pour lequel Honoré a toujours éprouvé la plus grande admiration. Il part pour Paris en 1966, où il donne des dessins pour la presse. En 1976 commence une collaboration ininterrompue de trente-neuf ans avec Lire, un magazine mensueld’actualité littéraire. Là, à partir de 1983, il propose des rébus illustrant noms d’auteurs ou titres d’ouvrages. Honoré revisite ainsi un genre familier au xixe siècle. Deux recueils reprennent ces motifs : Cent Rébus littéraires (2002) et Cent Nouveaux Rébus littéraires (2006). À leur propos, il expliquait : « Mon grand bonheur, c'est de provoquer un plaisir intellectuel aux gens qui cherchent les solutions. Et un plaisir visuel, car j'essaie au maximum de réaliser une vraie image qui tienne toute seule, sans texte » (La Montagne, novembre 2012). En juillet 1988, la revue Un bon dessin vaut mieux qu’un long discours lui consacre, au côté de Tim, son no 6. L’album Ouvert le jour et la nuit (1995) associe ses dessins à des textes de l’acteur Rufus. De 1984 à 2012, divers ouvrages comptent ses illustrations, en particulier des couvertures de textes classiques (Larousse) et des vignettes pour l’édition anniversaire du Petit Larousse (2010),en compagnie deCabu, Wolinski, Willem. Ainsi, le mot « cathartique » met en scène une évocation de la psychanalyse où le patient, minuscule, doit user d’une échelle pour atteindre un divan surdimensionné ; la légende, intégrée comme très souvent dans ses dessins, précise « À la recherche d’un choc émotionnel ».
Honoré aborde un autre registre avec l’illustration du Bestiaire d’Alexandre Vialatte (2002). Aux descriptions incongrues de l’écrivain humoriste, les dessins ajoutent des facéties originales. Honoré ne cherche pas l’anthropomorphisme, mais l’effet inattendu provoqué par d’improbables proximités entre animaux et objets techniques. Cette inspiration se retrouve dans les illustrations insolites de La symphonie animale. Comment les bêtes utilisent le son, d’Antonio Fischetti (2007) et de Comment attirer le wombat de Will Cuppy (2011).
La presse française ouvre largement ses pages aux dessins d’Honoré : Phosphore (1983-1991) ; Le Magazine littéraire (1983-2015) ; Libération (1987) ; Le Monde (1990-1996) ; Le Nouvel Observateur (1991-1993), La Vie ouvrière, L'Événement du jeudi, Les Inrockuptibles, etc., mais également Expressen, en Suède, ou Triunfo, en Espagne. Pour la collection « Les petits polars », il illustre Sur mes gardes de Franz Bartelt (2014). Le trophée Presse Citron, décerné par l’École Estienne, lui a été attribué en 2004 et 2006, et celui de meilleur dessinateur en 2013.
Après sa participation à La Grosse Bertha (1991-1992), hebdomadaire satirique opposé à la guerre du Golfe, Honoré rejoint l’équipe qui relance Charlie Hebdo en 1992 avec Philippe Val, Cabu, Willem, Georges Wolinski, Gébé[...]
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Écrit par
- Nelly FEUERHAHN : chercheuse honoraire au CNRS
Classification
Média