HOWL, Allen Ginsberg Fiche de lecture
Une nouvelle religiosité
La composition du poème a été précédée d'une vision à la William Blake, et Ginsberg déclare dans Angelical Ravings que « celui qui nie la musique des sphères nie la poésie et crache sur Blake, Shelley, le Christ et Buddha ». Les origines juive et russe de l'auteur affleurent parfois. De même, une Note à « Howl » fait référence à la Bible, au benedicite, car Ginsberg a toujours nourri une conception religieuse de l'homme. La seule possibilité d'intervention, dans cette situation désespérée, est l'amour de tous et de toutes choses.
D'un certain point de vue, cette poésie est sociale et engagée. Elle fait paraître bien pâles, par comparaison, les essais des poètes prolétariens de la génération précédente. Cet assaut contre l'Amérique, que Ginsberg aime malgré tout et qu'il voudrait voir digne de son destin démocratique, est efficace parce que sa voix sonne juste, parce que son hystérie est tempérée par l'humour, parce que enfin il n'idéalise pas les clochards et les drogués qu'il chante. Tout en prenant des libertés extrêmes, l'écriture de Howl s'inscrit dans la tradition américaine du poème scandé, celui de Vachel Lindsay (1879-1931) et de Walt Whitman (1819-1892), et aussi dans celle du sermon évangélique, qui pimente volontiers de mots d'argot sa rhétorique biblique. C'est l'inspiration du moment qui porte des images disparates, des notations visuelles, des haikai abstraits. Une invocation qui peut comporter par instants un aspect burlesque.
La réussite formelle de Howl provient non seulement de ses images mais de sa maîtrise du vers long ou du verset dont le rythme correspond à celui d'une respiration, voire d'un cri animal. Howl représente la première tentative, après celle de Carl Sandburg (The People, Yes, 1936), pour manier les rythmes naturels de la langue américaine à partir du verset strophique whitmanien. Idéalement, chaque phrase est une unité de souffle, le retour du mot « who » permettant de garder la mesure à l'intérieur de ce qui imite une rhapsodie démente.
Howl a été suivi d'une autre litanie d'inspiration hébraïque, Kaddish (1961). Cette belle réminiscence de l'enfance de Ginsberg, chant de deuil en hommage à sa mère, marque la fin de son lyrisme désespéré. Par la suite, le poète se tournera davantage vers le bouddhisme zen.
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Écrit par
- Michel FABRE : professeur émérite
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Autres références
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GINSBERG ALLEN (1926-1997)
- Écrit par Kenneth WHITE
- 508 mots
- 1 média
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