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GIGNOUX HUBERT (1915-2008)

L'histoire d'Hubert Gignoux, c'est celle des Jean Vilar, Jean Dasté, Roger Planchon. Celle des pionniers de la décentralisation, hérauts d'un « théâtre service public » qui, pour se vouloir populaire, s'est toujours montré d'une exigence et d'une éthique exemplaire.

Né à Lyon en 1915, cet acteur, metteur en scène et chef de troupe, s'est engagé très tôt dans le théâtre. Étudiant en droit et en sciences politiques, il rejoint, à dix-huit ans, les Comédiens Routiers de Léon Chancerel, neveu et émule de Copeau qui, de 1924 à 1929, avait quitté Paris et le Vieux-Colombier pour s'installer en Bourgogne avec ses « copiaux ». À leur exemple, Hubert Gignoux et ses camarades s'installent dans les villages, jouent sur des tréteaux.

La victoire du Front populaire et l'arrivée de Léo Lagrange à la tête du sous-secrétariat des Loisirs et des Sports en 1936 semblent autoriser tous les rêves. La guerre et la défaite ne les réduiront pas à néant. À Uriage, au sein du mouvement Jeune France, nombre d'animateurs jettent les fondements de la politique culturelle qui sera mise en œuvre après la Libération. Hubert Gignoux, fait prisonnier pendant la débâcle, est interné dans un stalag en Allemagne, où il crée des spectacles de marionnettes pour ses compagnons. La France une fois libérée, il fonde en 1947 avec Henry Cordreaux la Compagnie des marionnettes des Champs-Élysées. Nommé instructeur national d'art dramatique, en charge de stages destinés au théâtre amateur, il croise l'année suivante le chemin d'une troupe lauréate du grand prix amateurs au concours des jeunes compagnies : les Jeunes Comédiens de Rennes. De cette rencontre va naître le projet de création d'un centre dramatique en Bretagne. Proposé à Jeanne Laurent, sous-secrétaire d'État à la Jeunesse et aux Sports et grande ordonnatrice de la décentralisation théâtrale, il est accepté. En 1949, la Comédie de l'Ouest, quatrième centre dramatique national, est née. Hubert Gignoux en est le directeur. Il va se faire le missionnaire de l'action culturelle, créant un répertoire, s'appuyant sur une troupe, instaurant une morale nouvelle dans le droit fil des leçons apprises au cours de ses années de formation. Dès la première saison, il met à l'affiche Un Chapeau de paille d'Italie de Labiche, Le Baladin du monde occidental de Synge, L'Avare de Molière, L'Échange de Claudel. Gignoux est acteur dans la première pièce, metteur en scène pour les autres. La Comédie de l'Ouest propose un quatrième spectacle avec parades, destiné aux petites villes et aux villages : Georges Dandin, de Molière.

Hubert Gignoux va demeurer huit ans à Rennes avant de prendre, en 1957, la tête du Centre dramatique de l'Est, déplacé, en 1954, de Colmar à Strasbourg. Il succède à Michel Saint-Denis, son fondateur – lui aussi, émule et neveu de Copeau. Son action s'inscrit dans sa suite et dans celle du travail poursuivi en Bretagne. Plus que jamais, Hubert Gignoux réaffirme sa volonté d'illustrer et de défendre un répertoire de qualité. Il met en scène Eschyle, Brecht, Claudel, Labiche, Ibsen, Pirandello, O'Neill, Genet, crée des œuvres d'auteurs contemporains comme Morvan Lebesque, Max Frisch et surtout Friedrich Dürrenmatt dont il monte quatre pièces : Le Voyage de M. Mississippi, Frank V, Les Anabaptistes et La Visite de la vieille dame. Interprété par Valentine Tessier, ce spectacle est couronné par le grand prix du Syndicat de la critique en 1961.

L'une des originalités de Strasbourg est son École nationale supérieure d'art dramatique – la seule de ce type existant alors en France, en dehors du Conservatoire à Paris. Fondée par Michel Saint-Denis en 1954, elle dispense en trois ans, un enseignement original, là encore, largement inspiré des préceptes de[...]

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Écrit par

  • : journaliste, responsable de la rubrique théâtrale à La Croix

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  • TNS (Théâtre national de Strasbourg)

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    • 1 091 mots

    C'est le bâtiment construit entre 1888 et 1892 par les architectes Hartel et Neckelman, pour accueillir les sessions de la Délégation régionale, puis du Parlement d'Alsace-Lorraine en 1911, qui abrite aujourd'hui le seul théâtre national implanté en province. Après la Première Guerre mondiale, le Conservatoire...