REEVES HUBERT (1932-2023)
Ses recherches en astrophysique nucléaire
Les travaux de recherche d’Hubert Reeves ont porté sur l’astrophysique nucléaire, plus particulièrement la synthèse des éléments chimiques (en fait de leurs noyaux) par des réactions nucléaires. Sa thèse, soutenue en 1960, sous la direction d’Edwin Salpeter (1924-2008), a été consacrée à l’étude de la formation des éléments compris entre le néon et le soufre dans le tableau de Mendeleïev, par des réactions de fusion nucléaire du carbone et de l’oxygène, au cœur des étoiles géantes et supergéantes.
Un célèbre article de 1957, intitulé « Synthesis of Elements in Stars » et signé par Margaret Burbidge, Geoffrey Burbidge, William Fowler et Fred Hoyle, avait démontré que la plupart des noyaux chimiques ont été fabriqués dans les étoiles par des réactions nucléaires – ce que l’on appelle la nucléosynthèse stellaire – à l’exception toutefois des éléments les plus « légers » que sont le lithium, le béryllium et le bore. Ces derniers, parfois regroupés sous l’appellation LiBeB, n’avaient pas non plus été formés lors de la nucléosynthèse primordiale qui s’est déroulée dans tout l’Univers durant les premières minutes après le big bang.Entre 1965 et 1971, Hubert Reeves a réussi, en collaboration avec ses étudiants Jean Audouze et Maurice Meneguzzi, à déterminer l’origine de ces trois éléments peu abondants : ils ont été formés d’une manière particulière, appelée spallation nucléaire, sous l’effet du rayonnement cosmique. Ainsi, les chocs des particules cosmiques de haute énergie produisent ces éléments légers en brisant des noyaux atomiques plus gros (carbone, oxygène, azote) présents dans le gaz interstellaire. Ces recherches ont fait l’objet d’un article publié en 1971 dans la revue Astronomy & Astrophysics.
Ensuite, en collaboration avec le Germano-Suisse Johannes Geiss (1926-2020), Hubert Reeves a réussi à estimer l’abondance du deutériumdans l’Univers, cet élément chimique isotope de l’hydrogène, dont le noyau comporte un proton et un neutron. Cet élément a été produit (ainsi que l’hélium) lors du processus de nucléosynthèse primordiale,environ une minute après le big bang, et son abondance renseigne sur les conditions et le déroulement de l’évolution du cosmos durant cette période. Cette étude apporte des informations cosmologiques importantes, notamment sur la densité moyenne de la matière baryonique dans l’Univers, c’est-à-dire la matière « ordinaire » constituée principalement de baryons (c’est-à-dire les protons et les neutrons), par opposition à l’hypothétique matière noire qui serait de nature différente et encore inconnue. Ces travaux ont permis à ces deux scientifiques de recevoir la médaille Albert-Einstein en 2001.
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Écrit par
- Marc LACHIÈZE-REY : ancien élève de l'École nationale supérieure de la rue d'Ulm, docteur en physique, directeur de recherche émérite au CNRS
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Média