HUBERT ROBERT, 1733-1808. UN PEINTRE VISIONNAIRE (exposition)
Avec Hubert Robert(1733-1808). Un peintre visionnaire, le musée du Louvre, associé à la National Gallery of Art de Washington, présentait du 9 mars au 30 mai 2016 la première exposition monographique du grand peintre des Lumières depuis le bicentenaire de sa naissance.
On peut s’étonner d’avoir dû attendre si longtemps lorsqu’on découvre la richesse de son travail. Sa réputation de « peintre des ruines » l’a-t-elle écarté des questionnements de notre époque ? À moins que son œuvre si diversifiée ait été difficile à rassembler dans une exposition qui se veut exhaustive ? Guillaume Faroult, conservateur en chef du patrimoine au département des peintures du musée du Louvre, a relevé le défi en rassemblant une équipe remarquable autour de Margaret Morgan Grasselli et Yuriko Jackall pour les États-Unis. À travers les cent quarante dessins, peintures et gravures présentés dans le hall Napoléon, un parti pris thématique nous présente les différentes facettes de l'œuvre d'Hubert Robert, tout en en soulignant les constantes.
Peintures issues des fonds patrimoniaux français, des États-Unis et de Russie, dessins provenant de la riche collection du musée de Valence, ensemble décoratif, mobilier, projets de parcs, voici tout un ensemble exécuté par ce « peintre philosophe » qui fut aussi paysagiste, architecte, maître d’œuvre et homme d’institution, puisque, après avoir été admis à l’Académie royale de peinture et de sculpture en 1767, il fut nommé garde des tableaux du roi en 1770, puis dessinateur des jardins du roi en 1784 et garde du Muséum en 1786. Il fit un séjour en prison pendant la Révolution avant de devenir membre du conservatoire du Muséum national dont est issu le musée du Louvre. Hubert Robert est donc un homme du sérail. Sa carrière tout à fait singulière fait de lui un visionnaire capable d’explorer le futur tout en s’interrogeant sur la transmission.
Le séjour romain
Nous sommes accueillis dès l’entrée de l’exposition par le beau portrait qu’Élisabeth Vigée Le Brun réalisa en 1788 de son « ami Robert ». Elle le montre regardant vers la droite, selon le code classique utilisé pour représenter les visionnaires, en homme pleinement incarné, empoignant ses pinceaux tout en s’appuyant sur une balustrade. Sensible à « l’intarissable gaîté de son caractère », Élisabeth Vigée Le Brun le décrit aussi dans ses Souvenirs comme la personne « la plus répandue dans le monde ». « Répandu » à Paris, en France mais aussi dans toute l’Europe puisqu’on retrouve ses tableaux jusqu’à Saint-Pétersbourg. On ne s’attend donc pas à voir chez ce bon vivant un tel attrait pour la « poétique des ruines », comme Diderot qualifiera ses compositions, ni pour l’archéologie romaine. Certes, le long séjour qu’il fit à Rome, de 1754 à 1765, grâce à son puissant protecteur, le comte de Stainville, lui a apporté un répertoire de formes qui devait l’accompagner tout au long de sa vie. Et on apprécie, dans l’exposition, la confrontation avec Jean Honoré Fragonard qui se trouva à Rome en même temps que lui et peignit les mêmes motifs, comme la Grande Cascade à Tivoli ou La Lingère. En contrepoint, des ouvertures vers des artistes qui ont formé sa sensibilité, comme le graveur Giovanni Battista Piranesi, permettent de mieux comprendre l’importance de ces années romaines.
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Écrit par
- Marie-Josèphe BONNET : docteure en histoire, écrivaine
Classification
Média