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CUÉNOD HUGUES (1902-2010)

Une longévité hors du commun : le ténor suisse Hugues Cuénod s'est produit en public de 1928 à 1994, de la première en français de Jonny mène la danse (Johnny spielt auf) d'Ernst Krenek, au Théâtre des Champs-Élysées, à Paris, à ses adieux à la scène, à l'âge de quatre-vingt-douze ans, dans le rôle de Monsieur Triquet d'Eugène Onéguine de Tchaïkovski au Théâtre du Jorat de Mézières, près de Lausanne.

Hugues-Adhémar Cuénod naît le 26 juin 1902, à Corseaux (canton de Vaud), dans une famille fortunée : ces origines lui permettront d'échapper aux contingences matérielles, et de mêler un professionnalisme indubitable à l'enthousiasme de l'amateur. Il accomplit ses études musicales à l'Institut de Ribaupierre, à Lausanne, puis aux conservatoires de Genève et de Bâle, avant de partir se perfectionner à Vienne, auprès de Mme Singer-Burian (1925-1927), qui transforme le baryton-basse en ténor léger. Éclectique, Hugues Cuénod s'essaie au théâtre, au cinéma, accepte des engagements dans des cabarets, chante l'opérette et l'opéra-comique, la comédie musicale (il participe en 1929 à la création à New York de la revue à grand spectacle Bitter Sweet de Noël Coward, à qui il a été présenté par Mary Garden, la première Mélisande). Il pratique la musique ancienne dans le cercle de Geneviève Thibault, future comtesse de Chambures, et, en 1931, fait la connaissance de Nadia Boulanger, qui lui fait étudier Bach et les compositeurs anciens. En 1937, il enregistre, sous sa direction, un 78-tours de madrigaux d'un compositeur qui est alors mal connu et peu interprété, Claudio Monteverdi. Il interprète également des cantates de Bach sous la direction de Vincent d'Indy. Hugues Cuénod participe à la création de l'oratorio La Danse des morts de Honegger, à Bâle, le 1er mars 1940, sous la direction de Paul Sacher.

Il enregistre en 1938 la Troisième Leçon de ténèbres pour le mercredy saint de François Couperin (en décembre 1950, il gravera la Première Leçon de ténèbres pour le mercredy saint) et il sera un remarquable Évangéliste dans la Passion selon saint Matthieu de Bach enregistrée par Hermann Scherchen en 1953. La Troisième Leçon fait l'admiration de Stravinski, qui lui confie le rôle de Sellem (au côté d'Elisabeth Schwarzkopf – Anne) lors de la création du Rake's Progress, à La Fenice de Venise, le 11 septembre 1951, sous la direction du compositeur. Il reprend ce rôle pour ses débuts, en 1954, au festival de Glyndebourne, dont il devient la « coqueluche », et où il se produira 470 fois, incarnant notamment des personnages comiques : Don Basilio (Les Noces de Figaro de Mozart), Lucano (L'incoronazione di Poppea de Monteverdi), le Maître à danser (Ariane à Naxos de Richard Strauss ; il participe en 1954 à l'enregistrement légendaire de cet ouvrage sous la direction de Karajan, aux côtés de Rita Streich, de Hermann Prey, d'Elisabeth Schwarzkopf...), Monsieur Triquet, le Docteur Caius (Falstaff de Verdi), Erice (L'Ormindo de Cavalli) et, surtout, la vieille nymphe Linfea (La Calisto de Cavalli). Il débute au Covent Garden de Londres en 1954, où il est un extraordinaire Astrologue, à la voix suraiguë, du Coq d'or de Rimski-Korsakov. Il met par ailleurs sa diction parfaite au service de la mélodie française (Gounod, Debussy, Chabrier, Satie, Ravel, Roussel, Poulenc...), souvent accompagné par Geoffrey Parsons. Hugues Cuénod ne débute au Metropolitan Opera de New York que le 12 mars 1987 (il va avoir quatre-vingt-cinq ans !), en incarnant l'Empereur Altoum (Turandot de Puccini), au côté de Plácido Domingo (Calaf).

En 2007, à cent cinq ans, Hugues Cuénod signe un partenariat enregistré (équivalent suisse du Pacs français), s'unissant ainsi officiellement avec celui qui partageait sa vie depuis plus de vingt ans.[...]

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Écrit par

  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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