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HUGUES DE SAINT-VICTOR (1096?-1141)

D'origine inconnue, peut-être saxonne, peut-être flamande, Hugues dut entrer chez les chanoines réguliers de Saint-Victor de Paris peu après la fondation de ce monastère. Il y fut certainement reçu avant l'année 1127, car son nom apparaît à cette date au bas d'une charte de l'abbaye. Quoi qu'il en soit, Hugues ne devait pas tarder à devenir la personnalité la plus marquante de l'école, qui avait été annexée, dès le début du xiie siècle, à l'abbaye de Saint-Victor. Ses contemporains l'ont considéré comme le plus grand théologien de leur temps et lui ont donné le titre glorieux de « nouvel Augustin ».

L'œuvre qu'il a laissée est considérable. À l'exception de quelques traités réédités, elle n'est malheureusement accessible que dans des éditions très défectueuses, dont celle de Migne (Patrologia latina, t. CLXXV-CLXXVII, Paris, 1854), qui ne fait d'ailleurs qu'en reproduire de plus anciennes, mêle des ouvrages authentiques à d'autres qui ne le sont pas et en néglige d'importants. Telle que nous la connaissons, cependant, l'œuvre de Hugues témoigne de l'extraordinaire curiosité intellectuelle et de la vaste culture de ce maître, qui recommandait à ses disciples de tout apprendre parce que, disait-il, rien n'est inutile. Lui-même avait été le premier à mettre en pratique le conseil qu'il donnait ainsi aux autres.

Hugues est, en effet, d'abord un humaniste. Une partie notable de ses écrits est consacrée aux arts libéraux, aux sciences ou à la philosophie, dont il traite en particulier dans un manuel d'introduction aux études profanes et sacrées, demeuré célèbre, le Didascalicon. Mais il s'est intéressé aussi à l'histoire et a composé une Chronique universelle dont l'authenticité, parfois contestée, semble aujourd'hui bien établie. Exégète, il a commenté plusieurs livres de l'Écriture et a contribué à renouveler les méthodes de l'herméneutique traditionnelle.

Mais c'est en théologie qu'il devait donner toute sa mesure. Parmi ceux de ses ouvrages qui se rapportent à cette discipline, il faut mentionner surtout son vaste traité Des sacrements de la foi chrétienne (De sacramentis fidei christianae), véritable somme théologique où se déploie, dans toute sa dimension historique, l'économie du mystère chrétien, centrée autour de l'Incarnation. Cette théologie débouche tout naturellement sur une spiritualité, profondément influencée par celle du pseudo-Denys l'Aréopagite dont Hugues a commenté La Hiérarchie céleste, mais dans laquelle l'analyse intérieure tient également une large place. Hugues de Saint-Victor a exercé une influence considérable, non seulement sur la théologie de son temps, mais aussi sur celle de la fin du Moyen Âge et de l'époque moderne. Ses écrits n'ont jamais cessé d'être cités comme ceux d'un maître respecté et admiré de tous.

— Jean CHATILLON

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