HYGIÈNE
Les grandes étapes du développement de l'hygiène
La place de l’hygiène dans les cultures du monde méditerranéen – qui constituera le cadre essentiel de ce développement historique – est bien renseignée, reflet de l’importance qu’on lui a donnée dans ce bassin depuis l’Antiquité.
L'Antiquité
S’il est difficile de traduire en termes d’hygiène contemporaine les pratiques médicales de l’Antiquité sans verser dans l’anachronisme, on considère toutefois que l'hygiène se manifeste sous une forme implicite plusieurs siècles avant l'ère chrétienne. Ainsi trouve-t-on des directives de santé dans le Deutéronome.
De même, Lycurgue (env. 390-324 av. J.-C.), le législateur mythique de la Grande Rhêtra, code de sentences dont il dota Sparte, édicte un certain nombre de règles de vie individuelles fort strictes.
Hippocrate de Cos, qui est sans doute celui qui a le mieux mis en pratique les connaissances médicales de son temps, apporte à l'hygiène ses premières bases scientifiques. Ses écrits – encore appelés Corpus hippocratique –, intitulés De l'ancienne médecine, Des lieux dans l'homme, De la nature de l'homme et de la femme, Des épidémies, Du régime salutaire… sont le fruit non seulement de disciplines philosophiques, mais aussi d'une somme d'observations et d'expériences directes. Hippocrate note la réalité épidémique des maladies infectieuses sans pouvoir l’interpréter. S'il ne semble pas étudier le cheminement des épidémies, il s'intéresse à leurs causes en les associant aux vents et surtout à ce qu'il appelle la « constitution », c'est-à-dire le rapport qui existe entre « les constitutions atmosphériques et les maladies régnantes ». Son livre Des airs, des eaux et des lieux constitue un remarquable traité d'hydroclimatologie appliquée à la médecine et à l'hygiène : « Celui qui veut approfondir la médecine doit faire ce qui suit ; il considérera d'abord les saisons de l'année et l'influence respective que chacune d'elles exerce [...] Il est nécessaire aussi de connaître les qualités des eaux, qui diffèrent par la saveur et par le poids, et aussi par leurs propriétés. Donc lorsque le médecin arrive dans une ville de lui inconnue [...] il acquerra des notions très précises sur la nature des eaux dont les habitants font usage, si elles sont ou lacustres et molles, ou dures et sortant de lieux élevés et rocailleux, ou crues et saumâtres [...] Il reconnaîtra le genre de vie des habitants amis du vin, de la bonne chère et du repos, ou laborieux, adonnés aux exercices du corps, mangeant beaucoup et buvant peu. » Au temps d'Hippocrate se trouve ainsi définie la connaissance de l'hygiène – en fait le lien entre l’environnement et les individus – comme un prérequis de la pratique médicale.
Sous la Rome antique (sans doute en emprunt aux Étrusques) débute l'implantation de ce qu’on peut appeler l'hygiène du milieu de vie, un ensemble de pratiques et d’institutions qui seront exportées jusqu’aux confins de l’Empire. Les Romains, en effet, construisent des aqueducs permettant d'amener l'eau pure jusqu'aux agglomérations et la distribuer par des fontaines. Ils installent des égouts, souvent souterrains, et construisent des « thermes » (plus de 800 sous Dioclétien). Ces derniers deviennent une véritable institution dans tout l'Empire. Ce sont des lieux de réunion et de sociabilité, mais l’hygiène corporelle est aussi leur légitimité. L'hygiène du milieu et l'hygiène publique commencent à s'intégrer dans l'urbanisme ; la civilisation raffinée qui s'instaure, et où le culte du corps est pratiqué, conduit au perfectionnement de l’hygiène individuelle et de l’hygiène publique ; les exercices d'athlétisme sont prônés, et il[...]
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Écrit par
- Philippe HARTEMANN : professeur honoraire de santé publique, université de Lorraine, faculté de médecine de Nancy
- Maurice MAISONNET : professeur honoraire d'hygiène, de médecine préventive et de santé publique à la faculté de médecine de Rouen, chef du service d'hygiène du CHU de Rouen
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
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