HYPERCARD, logiciel
Le concept d’hypertexte a été inventé en 1945 par l’Américain Vannevar Bush (1890-1974). Ce physicien du Massachusetts Institute of Technology (MIT), devenu conseiller scientifique du président des États-Unis, imaginait alors un dispositif pour favoriser l’accès à l’ information structurée de façon non linéaire, enregistrée sur des microfilms. Cette idée continua d’inspirer quelques chercheurs comme les Américains Douglas Engelbart et Theodor Holm Nelson qui, à partir des années 1960, expérimentèrent sa réalisation sur des ordinateurs interconnectés par le réseau numérique Arpanet.
En 1987, Apple lance le logiciel HyperCard, qui met ce concept d’hypertexte en pratique. Son auteur, Bill Atkinson, a participé à l’aventure du Macintosh, élaboré un projet de tablette numérique jugé prématuré par la direction et pris l’initiative personnelle de développer un système de gestion de l’information fondé sur la notion d’hypertexte. John Sculley, alors patron d’Apple, adopte ce projet et décide d’en équiper tous les nouveaux Macintosh.
HyperCard organise l’information selon l’image mentale d’une pile de cartes, un peu comme les fiches bristol rangées dans des tiroirs qui constituaient les catalogues des bibliothèques. Chaque « carte » virtuelle peut contenir non seulement du texte, mais aussi des images ou du son, et plus largement tout fichier numérique pouvant être stocké dans la mémoire d’un ordinateur ou sur un CD-ROM. Ce qui correspond bien à la vocation multimédia du Macintosh. L’originalité d’HyperCard est la mise en liaison des cartes : si l’utilisateur perçoit une proximité logique entre le contenu de deux cartes, il peut les connecter par un « lien » logiciel. Ce lien est représenté sur l’écran par un « bouton » (qui peut être un mot ou une image), sur lequel on peut cliquer pour accéder à la carte reliée, et de celle-ci à d’autres encore en un chaînage d’informations virtuellement infini. Si l’on effectue cette action quotidiennement aujourd’hui sur Internet sans même y prêter attention, il s’agissait à l’époque d’une innovation révolutionnaire.
HyperCard simule ainsi le fonctionnement de l’esprit lorsque l’on fait des associations d’idées. C’était exactement la vision de Vannevar Bush, qui rêvait d’aider les scientifiques à multiplier les pistes de recherche. Ce système n’implémente d’ailleurs qu’une partie des concepts hypertextuels, ne serait-ce que parce qu’il se limite aux fichiers stockables sur le disque de l’ordinateur et qu’il était difficile de faire de la vidéo sur un Macintosh à 512 kilo-octets de mémoire. Mais il est simple et facile à utiliser, par exemple pour la gestion personnelle d’agendas ou de projets, pour l’accès à une base de données ou pour préparer une présentation. Apple, excessivement optimiste, estimait même à l’époque qu’un débutant pourrait le programmer grâce à son langage HyperTalk. C’est donc par la pratique non experte des consommateurs qu’HyperCard est le premier logiciel à répandre dans le public, au-delà du petit monde des laboratoires, la notion d’hyperlien permettant de naviguer entre des fichiers multimédias.
Apparaissant juste au moment où se développe Internet, HyperCard, commercialisé en 1987, préfigure l’hypertexte du Web proposé au public en 1993, et contribue à y préparer les esprits. HyperCard restera diffusé par Apple jusqu’en 2004. Il n’aura pas de successeur direct, mais ses fonctions seront reprises par de nombreuses applications liées au Web.
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Écrit par
- Pierre MOUNIER-KUHN : historien, chercheur au CNRS
Classification
Autres références
-
HYPERTEXTE
- Écrit par Gérard VERROUST
- 833 mots
La problématique de l'hypertexte a été énoncée pour la première fois en 1945 par l'Américain Vannevar Bush (1890-1974), pionnier de l'informatique et du calcul automatique. Il proposait, sous le nom de memex, un système dans lequel un individu aurait pu stocker des documents,...