HYPNOSE
Retour de l'hypnose
Dans les années 1970, l'hypnose et la suggestion sont revenues à l'ordre du jour.
Il est apparu qu'il existait dans les différentes techniques un facteur d'efficacité lié à une bonne relation entre le médecin et son patient. On pourrait dire, en d'autres termes, qu'il s'agit là d'un phénomène de suggestion. Sous ce nom, on a pendant longtemps vu uniquement la domination exercée par le médecin sur son malade au moyen d'injonctions verbales. Mais il existe aussi une forme de suggestion, plus importante, qui est, selon Freud, « un phénomène originaire qu'on ne peut réduire davantage, un fait fondamental de la vie psychique de l'homme ». Cette suggestion indirecte, non délibérée, émane du patient : « Un facteur dépendant de la disposition psychique du malade influence, sans aucune intention de notre part, le résultat de tout processus thérapeutique introduit par le médecin. » « Cette attente croyante », comme dit encore Freud, n'est « ni dosable, ni contrôlable, ni intensifiable ». Mais, grâce au transfert, elle pourra être maîtrisée, interprétée, résolue. Dans la perspective rationaliste de Freud, l'affectif devait ainsi être intégralement pris en compte dans la relation, et sous le strict contrôle du cognitif.
Mais on s'est aperçu, dans la suite, que la relation comportait un élément archaïque non accessible à la verbalisation. Depuis la dernière guerre mondiale, les travaux psychanalytiques ont mis de plus en plus l'accent sur la relation mère-nourrisson, saisie au stade pré-langagier. Ils ont fait ressortir qu'elle joue un rôle crucial dans la psychopathologie future de l'enfant et, corrélativement, dans le traitement. Pour celui-ci, l'interprétation, processus intellectuel, devient moins importante que cette forme de communication affective intense, fusionnelle, symbiotique, que l'on appelle l' empathie.
Cette nouvelle perspective change quelque peu le rapport des termes dans la dualité traditionnelle : traitement « symptomatique » et traitement « causal ». Dans certains cas, la réparation affective en profondeur, plus restructurante, correspondrait au causal, tandis que la prise de conscience, élément cognitif, se rapprocherait de l'apprentissage et entrerait plutôt dans le symptomatique.
L'hypnose, nous l'avons vu, offre un modèle privilégié d'empathie. De sorte que, comme l'annonçait L. Chertok (1965), la « psychanalyse, qui est issue de l'hypnose et a permis de mieux la comprendre, peut se trouver éclairée par elle ». Il y a là un étonnant renversement de situation si l'on considère que la constitution de la psychanalyse a amené la mise à l'écart de l'hypnose. Or c'est à propos d'un concept fondamental de la psychanalyse que l'hypnose a fait son retour. On tenait jusqu'ici pour indubitable que le transfert avait éliminé l'hypnose dans la relation médecin-malade. Mais François Roustang (1980) se demande si le véritable ressort du transfert n'est pas identique à celui de l'hypnose. Identité qui a été soupçonnée par Freud, tandis que ses continuateurs, y compris Jacques Lacan, ont rejeté toutes les questions sur ce sujet. De son côté, Octave Mannoni estime que, si Freud a fait entrer l'hypnose dans la psychothérapie, « il l'a noyée sous l'aspect obscur du transfert ».
Ce regain d'intérêt pour l'hypnose ne se manifeste pas seulement chez des psychanalystes. On le constate aussi chez des philosophes, en particulier René Girard, Jacques Derrida et ses disciples. L'un d'eux, M. Borch-Jacobsen (1982), relève que, chez Freud, le transfert et la suggestion sont une seule et même chose. Dès lors, l'énigme qui entoure cette dernière contamine aussi le transfert et, par voie de conséquence, toute la[...]
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Écrit par
- Léon CHERTOK : docteur en médecine, directeur d'enseignement clinique à la faculté de médecine Lariboisière-Saint-Louis, université de Paris-VII
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Médias
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