- 1. Le point de départ : moraines et roches striées, critères d’une glaciation
- 2. Glaciation locale ou générale au Précambrien tardif ?
- 3. L’hypothèse de la Terre « boule de neige » ou Snowball Earth
- 4. Hypothèse de glaciation-déglaciation testable
- 5. De l’hypothèse à la théorie de la Terre « boule de neige »
- 6. Le temps des modèles climatiques performants
- 7. Les grandes lignes d’un scénario pour le Cryogénien
- 8. Bibliographie
TERRE BOULE DE NEIGE HYPOTHÈSE DE LA
L’hypothèse de la Terre « boule de neige » ou SnowballEarth
C’est dans ce contexte de doute que l’idée d’une Terre « boule de neige », entièrement englacée, apparaît en 1992 lorsque le paléomagnéticien Joe Kirschvink lui donne un contenu clair. Kirschvink lui-même était d’abord opposé à cette idée et cherchait à réfuter la glaciation aux basses latitudes. Ses propres résultats vont le faire changer d’avis. Son hypothèse s’appuie sur trois éléments issus de trois disciplines différentes dont il fait la synthèse.
Paléomagnétisme et géologie
Les mesures magnétiques de Kirschvink vont dans le même sens que celles de Harland et celles d’Embleton et Willams. En outre, l’abondance de fragments de carbonates, dans les tillites de toutes origines, suggère que la glace s’est déplacée sur une plateforme carbonatée qu’elle a rabotée. Or les carbonates ne se déposent que dans des eaux chaudes et peu profondes qui devaient donc exister avant les glaciers. Pour Kirschvink, seule une glaciation équatoriale généralisée peut expliquer ces données.
Physique du climat
Il fallait trouver un mécanisme permettant de conduire à une telle glaciation. Dans les années 1960, les climatologues développent des modèles climatiques fondés sur le bilan radiatif de la Terre et étudient l’influence des différents paramètres en jeu comme la concentration atmosphérique des gaz à effet de serre. En 1969, dans la perspective d’une éventuelle guerre atomique (et d’un hiver nucléaire), Mikhaïl Boudyko, climatologue soviétique, développe un modèle climatique en s’appuyant sur des bilans énergétiques. Un abaissement des radiations solaires lié, par exemple, à la libération en grande quantité de poussières volcaniques serait responsable d’une diminution de la température moyenne de la Terre et du développement d’une couverture de glace. Mais cette relation n’est pas linéaire et, surtout, si l’abaissement des radiations était de 1,6 p. 100, la glace atteindrait le seuil de 50 degrés de latitude à partir duquel le système s’emballe. En effet, la glace a un albédo très élevé, c’est-à-dire qu’elle réfléchit une grande partie du rayonnement solaire. Sa présence provoque un abaissement de la température locale et la couverture glaciaire s’étend alors, augmentant encore l’albédo de la Terre. Cette rétroaction positive de l’albédo de la glace permettrait le développement inéluctable de la couverture glaciaire jusqu’à l’équateur tandis que la température moyenne de la Terre baisserait de plusieurs dizaines de degrés. Ainsi, selon Boudyko, le climat de la Terre est particulièrement instable et une glaciation complète est possible.
Le scénario de Kirschvink repose également sur une particularité du Néoprotérozoïque : le positionnement de l’ensemble des masses continentales à des latitudes moyennes et basses. Or, les continents, dépourvus de végétation à cette époque, sont d’assez bons réflecteurs de l’énergie solaire. L’albédo global de la Terre dans ce contexte aurait été suffisamment élevé pour permettre le développement de glaciers continentaux étendus. En outre, si de vastes mers épicontinentales peu profondes se trouvaient sous les tropiques, une légère baisse du niveau marin aurait transformé ces étendues marines d’albédo faible en grandes surfaces continentales réfléchissantes d’albédo élevé. Ce phénomène associé à la rétroaction positive de l’albédo de la glace aurait permis d’atteindre le point critique où le système s’emballe. La plus grande partie des océans aurait alors été recouverte par la banquise, au moins jusqu’aux latitudes moyennes. Banquise et glaciers continentaux, recouverts de neige, auraient donné à la Terre un aspect « boule de neige ».
Géochimie, roches et gaz à effet de serre
Mais cela ne dit pas comment la Terre serait sortie[...]
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Écrit par
- Françoise DREYER : agrégée de l'université, historienne des sciences, chercheuse associée au Centre François Viète, université de Nantes
Classification
Médias
Autres références
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PROTÉROZOÏQUE
- Écrit par Janine BERTRAND-SARFATI et Renaud CABY
- 3 808 mots
- 1 média
...de l'équateur. Il semble que si des glaciers atteignent une certaine latitude ils présentent alors une expansion rapide et très large. C'est ainsi que Kirschvinck (1992) a proposé l'hypothèse d'une Terre alors « boule de neige » entièrement gelée, idée encore très controversée. Cette ...