Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

IBN GUZMAN (1095 env.-1160)

Questions pendantes

Pourquoi cet homme manifestement doué pour la satire, et qui n'aimait guère les faḳīhs, lesquels le lui rendaient bien, a-t-il somme toute ménagé ses ennemis ? Par prudence ? ou générosité ? Le zadjal d'Ibn Guzman doit-il quelque chose à des chansons véritablement populaires ? Controversée, la question le restera sans doute longtemps comme tant d'autres touchant les relations de l'art « populaire » à l'art tout court. Ibn Guzman est-il le père des troubadours ? Le grand auteur arabo-andalou de ballades populaires intrigue les comparatistes. Non pas tant à cause des bribes de romanisme qui se retrouvent dans sa langue : c'était normal en Espagne andalouse (et, du reste, aucune finale de ses zadjals n'est composée en langue romane), mais à cause de ses relations avec la technique des troubadours de langue d'oc. Quand on ne cède pas au chauvinisme, il semble malaisé de contester l'heureuse influence du zadjal sur la métrique et quelquefois la thématique des troubadours. Comme le signalait déjà E. Lévi-Provençal, à qui l'on doit, outre de beaux travaux sur l'Espagne andalouse, une excellente bibliographie d'Ibn Guzman, « ce zadjal hispanique est passé en Espagne chrétienne, mais il y est passé assez tard sous la forme de production en langue castillane ». Deux thèses inédites, œuvres d'Égyptiens, confirment l'action du zadjal non seulement sur la poésie de langue castillane, mais sur celle des troubadours. Un comparatiste algérien, J. E. Bencheikh, a montré l'influence du zadjal sur un poète au moins de la Renaissance italienne, Jacopone da Todi.

Autant par ses mérites propres que par son influence comme auteur d'un genre d'avenir, Abū Bakr Ibn Guzman importe donc à la littérature populaire arabo-andalouse et à la littérature universelle.

—  ETIEMBLE

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur honoraire à l'université de Paris-IV

Classification