IBN ḤAZM (994-1064)
De souche andalouse convertie à l'islam, Ibn Ḥazm fut autant homme d'action qu'homme d'étude.
Le Collier de la colombe est l'œuvre d'un poète d'une psychologie raffinée qui n'est pas sans affinités avec l'amour courtois ; cependant, ses ouvrages doctrinaux semblent l'emporter.
Historien, juriste, théologien, il composa une critique des religions qui embrasse également les sectes islamiques et consacra plusieurs ouvrages au droit ẓāhirite.
Plutôt méfiant à l'égard de l'humaine nature, il aspirait à revivre la foi et la Loi avec la rigueur qu'elles avaient au temps du Prophète et de ses compagnons. Cette optique le rendait aussi insensible aux notions d'évolution et d'adaptation que vigoureusement rebelle au formalisme que sécrète toute sclérose.
Une existence aventureuse
Abū Muḥammad ‘Alī b. Aḥmad b. Sa‘īd Ibn Ḥazm naquit à Cordoue en 994 (384 de l'hégire). Son père fut un haut fonctionnaire touchant de très près aux sphères du pouvoir qui était alors exercé, non par le calife umayyade, mais par un « maire du palais » (le ḥāǧib). C'est à Cordoue qu'Ibn Ḥazm passa son enfance, jusqu'à la chute des ‘Āmirides en 1009. Après le luxe, il connut les tribulations. Les troubles et les guerres civiles, les vicissitudes dues aux factions hostiles (parti andalou, Berbères et proberbères, Esclavons) mûrissent ce tout jeune homme, mais aussi exacerbent sa sensibilité innée.
À l'arrivée des Berbères, il quitte Cordoue pour Almeria ; suspecté, il en est chassé et finit par arriver à Valence. Le calife ‘Abd al-Raḥmān IV venait d'y prendre le pouvoir, appuyé par les Esclavons. Ibn Ḥazm, légitimiste de cœur, se dévoua à sa cause jusqu'à l'assassinat de ce prince (1019). On le retrouve ensuite à Cordoue, puis à Játiva. Ministre à Cordoue de son ami le calife ‘Abd al-Raḥmān V, Ibn Ḥazm est emprisonné après le renversement de ce dernier. Libéré, il se consacre dès lors à l'étude. Il n'est pas sûr qu'il ait repris, comme le prétend Yāqūt (géographe qui, dans Irshād al-Arib, traite des hommes illustres), une carrière politique sous Hišām III. La fin de sa vie, quoique retirée, ne fut pas sans souci. Ses doctrines lui suscitaient des ennemis. Il mourut près de Badajoz.
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Écrit par
- Roger ARNALDEZ : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Paris-IV-Sorbonne
Classification
Autres références
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ARABE (MONDE) - Littérature
- Écrit par Jamel Eddine BENCHEIKH , Hachem FODA , André MIQUEL , Charles PELLAT , Hammadi SAMMOUD et Élisabeth VAUTHIER
- 29 245 mots
- 2 médias
...C'est un peu plus tard, pendant la guerre civile qui aboutit au démembrement de l'empire des Umayyades, que se signala une personnalité exceptionnelle, Ibn Ḥazm (384-456/994-1064), qui domine tous les domaines de l'activité intellectuelle et demeure un des représentants les plus prestigieux de la culture...