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IDÉOLOGUES

Constantin-François Volney

Constantin-François Volney (1757-1820) est le moraliste et le sociologue de l'idéologie. Il représente, conjugués, l'amour du progrès et l'attachement paysan à la terre, avec une gravité constante et une sensibilité réelle mais mesurée. D'un courage entier pendant la Révolution et face à Napoléon qu'il aida d'abord, il fut toujours partisan du silence philosophique devant toutes les folies individuelles ou collectives. Il fut connu par le récit sobre et riche en renseignements de ses voyages en Syrie et en Égypte. Dans Les Ruines ensuite, il médite sur la décadence des empires qui se sont succédé sur la terre. Du haut des ruines de Palmyre, en une vue panoramique et prophétique, il traite de la multiplicité des systèmes religieux qui se clôt par la montée libératrice du peuple français. Dans ses descriptions hautaines, à peine apitoyées parfois, il témoigne de plus de sens moral que de sens religieux. Quatre ans avant la parution du livre de Condorcet, il raisonne à partir de l'idée de perfectibilité de l'homme ; s'il reste fidèle aux lois de sa nature, celui-ci peut s'organiser pour un mieux-être. Il n'a pas été créé pour le malheur et l'angoisse et il est régi par des lois qu'il peut maintenir naturelles, s'il sait écouter ses capacités de sentir. L'ignorance est donc la pire des fautes. Avec la liberté retrouvée en Occident, un nouveau siècle, une société neuve vont s'épanouir, fondés sur la recherche du bonheur. Dans le Catéchisme du citoyen français (1793), Volney décrit les principes de la morale dont le premier est la conservation de soi : « Conserve-toi, instruis-toi, modère-toi, vis pour tes semblables, afin qu'ils vivent pour toi. » Dans des temps difficiles, cette éthique n'est pas sans virilité, si théoriquement elle représente une synthèse bien ardue d'un matérialisme et d'un stoïcisme peu enclins à l'enthousiasme.

Cet indépendant incapable de palinodie s'est livré à bien d'autres travaux d'histoire et de méthodologie anthropologique, comme tant d'autres : Condorcet, Lavoisier, Laplace, Lagrange, Monge, Draparnaud, Lamarck, Bichat, Pinel, Broussais, Thurot, Fauriel, Rœderer, Dupuis, Daunou, Degérando, Garat, Siéyès, Ginguené. Leurs doctrines communes essaimèrent en Italie et, par Jefferson, en Amérique. La pensée romantique, l'éclectisme cousinien les firent oublier. La connaissance de leurs mérites commence à poindre à la fin du xxe siècle.

— André CANIVEZ

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