SOLÀ-MORALES RUBIÓ IGNASI DE (1942-2001)
Né en 1942 à Barcelone, Ignasi de Solà-Morales Rubió y étudie l'architecture et obtient son diplôme en 1966. Docteur en architecture, il mène également des études de lettres et de philosophie. Cette solide formation le conduit à s'intéresser, dans un premier temps, à la théorie et à l'histoire de l'architecture, qu'il enseigne à l'École d'architecture de Barcelone à partir de 1978 – son frère aîné, Manuel, également architecte, s'est en revanche dirigé vers la pratique du projet, principalement urbain.
Les nombreux articles et ouvrages d'Ignasi de Solà-Morales portent notamment sur l'histoire de l'architecture en Espagne, et plus particulièrement en Catalogne : on lui doit ainsi un Gaudí (Rizzoli, New York, 1984) et un Jujol (Poligrafia, Barcelone, 1990) – deux des constructeurs les plus marquants du modernisme catalan –, mais aussi des études sur ses contemporains (Carlos Ferrater, Juan Navarro Baldeweg). Solà-Morales participe de cette façon au profond renouveau de la culture catalane post-franquiste.
Sur un plan plus théorique, il cherche à redéfinir les termes d'une critique architecturale éclairée ; sa culture philosophique l'amène à aborder des notions telles que l'individualisme et l'existentialisme, tout en traitant des thèmes fondamentaux de l'architecture contemporaine : le classicisme, l'éclectisme, le fonctionnalisme et, bien sûr, la modernité, dont il met en évidence la dimension rhétorique. Sensible à la richesse des travaux critiques menés pendant les années 1960-1970, il consacre une étude percutante au problème de la figuration dans le néo-rationalisme italien, mouvement dont Aldo Rossi et Giorgio Grassi sont alors deux figures éminentes.
Dans l'un de ses derniers textes, pour la revue italienne Zodiac en 1999, Solà-Morales regrettait encore l'isolement des discours théorique et historique sur l'architecture, et plaidait pour une ouverture de cette discipline vers d'autres champs de réflexion, vers d'autres méthodes d'analyse également. L'audience internationale recueillie par ses écrits le conduit à enseigner dans diverses universités étrangères, et à participer au groupe de réflexion „Any“, aux côtés de Rem Koolhaas, de Peter Eisenman et de Rafael Moneo.
Le rapport entre théorie et pratique de l'architecture a été l'une des préoccupations constantes d'Ignasi de Solà-Morales. Aussi n'est-il pas surprenant que le critique et l'historien aient si parcimonieusement laissé la place à l'architecte. Modeste, son œuvre construite n'en constitue pas moins le prolongement logique des ses écrits. Ses deux grands projets, atypiques l'un et l'autre, sont en effet deux leçons d'histoire, architecturale et urbaine.
Le premier est une recréation : celle, en 1986, du pavillon allemand construit par Ludwig Mies van der Rohe, dans le cadre de l'Exposition internationale de Barcelone (1929). Détruite après le clôture de l'exposition, cette construction faite de travertin, de marbre et de verre, à la fois classique et renouvelant entièrement les conceptions de l'espace traditionnel, fut rapidement considérée comme l'une des œuvres majeures du style international. À partir de documents d'origine, Solà-Morales, en association avec Fernando Ramos et Cristian Cirici, a procédé à la reconstitution fidèle du bâtiment sur la colline de Monjuïc, tout en le dotant des qualités constructives nécessaires à sa pérennité.
Avec Lluís Dilme et Xavier Fabre, il réalise un autre projet majeur : la reconstruction du Liceu, célèbre théâtre construit en 1874 en bordure de la Rambla à Barcelone, dont l'architecture intérieure avait été ravagée par un incendie le 31 janvier 1994. L'ambition des architectes sera de restituer le volume de la salle à l'italienne[...]
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Écrit par
- Simon TEXIER : professeur, université de Picardie Jules-Verne
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