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IMAGE ANIMÉE

Capter le mouvement : Étienne-Jules Marey

Étienne-Jules Marey - crédits : Cinémathèque française

Étienne-Jules Marey

Marey utilise en 1882 une première caméra à disque obturateur qui enregistre une série de vues séquentielles sur une seule plaque de verre sensible. Avec sa nouvelle méthode, la chronophotographie  l’écriture du temps par la lumière ,Marey devient la personnalité la plus avant-gardiste, au point de vue technique, scientifique et artistique, de cette période. En 1888, il adapte à sa caméra une bande sensible mobile avant d’obtenir, en 1889, les premières séries de clichés sur des pellicules de celluloïd provenant de l’appareil photographique Kodak commercialisé par Eastman. Le mouvement et la vie sont enfin captés et fixés dans toutes leurs phases sur un support transparent, souple et sensible : le film. Dès lors, le rêve devient réalité : les images animées et auparavant éphémères de la camera obscura sont désormais reproductibles. Le « mouvement continué » devient théoriquement possible.

Avec ses quelque huit cents films chronophotographiques réalisés à partir de 1889, Marey, premier cinéaste du xixe siècle, produit une sorte d’encyclopédie filmique du mouvement et révèle des formes que personne n’avait vues avant lui. Il parvient à ralentir et accélérer le temps, à mesurer et maîtriser l’espace, à recréer la vie par des images ou des machines. Les caméras chronophotographiques de Marey vont influencer tous les chercheurs en images animées des années 1890.

Sans le savoir, Marey ouvre également la voie aux futurs effets spéciaux cinématographiques. Il habille de noir les parties du corps que l’on ne veut pas voir figurer sur l’image : par exemple, l’une des jambes, ou bien la moitié du corps. Georges Méliès reprendra cette technique, par exemple dans Le Cake-Walk infernal (1903), dans lequel des bras, des jambes remuent seuls, comme détachés du tronc du danseur. Un autre système révolutionnaire préconisé par Marey et consistant à habiller son sujet d’un costume entièrement noir, mais sur lequel on a fixé d’étroites bandes de métal brillant qui courent le long de la jambe, de la cuisse et du bras, par exemple, permet à la caméra de n’enregistrer que les lignes brillantes formées par les bandes collées sur les rayons osseux. Cette méthode préfigure celle de la motion capture ou performance capture utilisée, par exemple, dans Avatar de James Cameron (2009).

Durant les années 1880-1890, une vague chronophotographique touche toute l’Europe : William Friese-Greene et Louis Le Prince au Royaume-Uni, Albert Londe, Hippolyte Sebert, Léon Bouly, Georges Demenÿ (assistant de Marey) en France, Ottomar Anschütz en Allemagne, entre autres, explorent d’autres systèmes et produisent quantité d’images animées. Le Français Émile Reynaud suit une autre voie, plus primitive mais non moins artistique : le film peint. Il imagine d’abord le praxinoscope (1877), un appareil tournant dans lequel la substitution d’une image à une autre se fait au moyen de miroirs prismatiques. Il conçoit ensuite plusieurs variantes et, en 1888, crée le théâtre optique, version très agrandie du praxinoscope à projection. Les Pantomimes lumineuses, merveilleuses et longues saynètes à l’animation fluide, entièrement peintes à la main, viennent illuminer l’écran du musée Grévin à Paris, de 1892 à 1900.

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Écrit par

  • : directeur scientifique du patrimoine à la Cinémathèque française

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Médias

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La lanterne magique

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Phénakistiscope de Joseph Plateau

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