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PROPHYLACTIQUES IMAGES

Dans les civilisations qui considèrent qu'une image est le support ou le substitut matériel d'une idée, la possession d'une représentation figurée prend le sens magique, conféré aux amulettes, de garantie et de protection (la représentation d'un œil prophylactique au fond d'une coupe ou sur l'étrave d'un navire, dans la céramique grecque, l'illustre abondamment). Il est intéressant de noter que l'apparition de la gravure, à la fin du Moyen Âge, n'altéra pas immédiatement, en multipliant sa reproduction, la puissance magique de l'image. Les premières gravures occidentales sont des xylographies ; exécutées sans doute dans les monastères, elles sont vendues directement à des pèlerins ou par colportage ; elles possèdent encore, malgré leur multiplicité et leur aspect fruste, un pouvoir surnaturel qui ira, bien sûr, en s'affaiblissant au début du xvie siècle. Mais Érasme, dans son Encomium Moriae, s'insurge encore contre ces pratiques superstitieuses, fondement de « l'image de piété », encore vivaces de nos jours. Pour se protéger, on cousait ces images grossières dans des vêtements, on les accrochait dans les maisons ou les boutiques. On en a retrouvé collées sur des portes (British Museum) ou même dans des cercueils (Bruges). Le Cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale de Paris possède la plus belle collection (quatorze) de ces gravures primitives à caractère prophylactique ; elles représentent la Vierge ou saint Christophe, et sont collées dans des coffrets bardés de fer et de serrures, où l'on renfermait, sans doute, des titres de propriété ou des bijoux. L'emplacement de ces images prouve qu'elles n'étaient nullement destinées à être vues, leur pouvoir protecteur dépendant, au contraire, du secret qui entourait leur présence.

— Michel MELOT

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Écrit par

  • : directeur de la bibliothèque publique d'information, Centre Georges-Pompidou

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