IMPACT MÉTÉORITIQUE DE LA LIMITE CRÉTACÉ-PALÉOGÈNE
L'existence d'une phase d'extinction d'espèces de grande ampleur à la limite entre le Crétacé et le Paléogène (et donc entre deux ères, le Mésozoïque et le Cénozoïque), datée de 66 millions d'années, est connue depuis le xixe siècle, et ses causes ont fait longtemps l'objet de spéculations. C'est en 1980 qu'a été mis en évidence à cette limite stratigraphique – appelée limite K-T (K pour Kreide, « craie » en allemand ; T pour l’ère tertiaire, qui constitue désormais avec le Quaternaire l’ère cénozoïque), puis limite K-Pg (Pg pour Paléogène) – un impact météoritique majeur qui est souvent considéré comme l'explication la plus plausible de cette extinction en masse. Alors que les polémiques au sujet du rôle de cet impact ont baissé d'intensité, les recherches sur le déroulement du phénomène et ses conséquences sur la biosphère ne cessent d'apporter des informations nouvelles.
Premières traces d’un impact météoritique
La découverte de cet événement est le résultat de recherches sur la stratigraphie de la transition entre le Crétacé et le Paléogène menées dans la région de Gubbio, en Italie. La limite entre les deux périodes y est marquée par une mince couche d'argile sombre séparant des formations principalement calcaires. Dans un article publié en 1980 dans la revue Science, un groupe de chercheurs de l'université de Berkeley – composé du physicien Luis Alvarez, de son fils le géologue Walter Alvarez et des géochimistes Frank Asaro et Helen Michel – signala que ce niveau d'épaisseur centimétrique contenait une très forte concentration en iridium (soit 30 fois plus que dans les niveaux environnants), métal du groupe du platine habituellement très rare dans les roches de la croûte terrestre, mais beaucoup plus abondant dans certaines météorites (les chondrites carbonées). Il ne s'agit pourtant pas d'un simple phénomène local, car des analyses réalisées sur des niveaux de position stratigraphique similaire au Danemark et en Nouvelle-Zélande révélèrent aussi de hautes concentrations en iridium. Pour expliquer cet enrichissement, les auteurs de l'article supposèrent qu'une très grosse météorite (un astéroïde), d'un diamètre d'environ 10 kilomètres (taille estimée à partir de la quantité d'iridium déposée à l'échelle mondiale), était entrée en collision avec la Terre, éjectant dans l'atmosphère des quantités énormes de matériaux pulvérisés riches en iridium qui, en retombant à la surface du globe, avaient donné naissance à la couche argileuse enrichie en cet élément, à l'échelle mondiale.
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Écrit par
- Eric BUFFETAUT : directeur de recherche émérite au CNRS
Classification
Médias