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IMPERATOR

À Rome, à l'origine, l'imperator est celui qui commande (imperat, étymologiquement : « préparer pour », d'où « ordonner ») ou qui possède l'imperium ; celui-ci est le pouvoir souverain, délégué par Jupiter ( ?), dont la volonté se manifesterait (au travers du peuple dans le vote des comices) aux consuls et aux préteurs, et, en dehors de la ville, aux proconsuls et aux propréteurs ; c'est un pouvoir d'ordonner et de juger, symbolisé par les faisceaux : haches entourées de verges portées par les douze ou les six licteurs qui escortent consuls ou préteurs. Durant les deux derniers siècles de la République, si, en province, le gouverneur (proconsul, propréteur) est assez couramment désigné par ce titre, il semble qu'il y ait cependant une tendance pour le magistrat à ne le porter que si, à la suite d'une victoire importante ayant entraîné la mort d'un nombre réglementaire minimal d'ennemis (chiffre inconnu : de mille à dix mille, suivant les sources), ses soldats, sur le champ de bataille, l'ont salué du nom d'imperator : c'est l'ovation (ovatio), qui, normalement, doit, après ratification du sénat, permettre au vainqueur de célébrer le cérémonie du triomphe par laquelle, pour un jour, il s'identifiera à Jupiter. Il va de soi que des largesses opportunément faites aux soldats peuvent les pousser à ces acclamations. Par ailleurs, il semblerait que le sénat puisse donner de lui-même, en l'absence de toute ovation des soldats, le titre d'imperator ; en outre, Cicéron, par exemple, se livre à des confusions volontaires entre imperator au sens de simple « détenteur de l'imperium » et au sens de « vainqueur qui a obtenu l'ovation ». L'imperator, après son triomphe ou du moins après son retour dans la Ville, abdique son titre. Jules César sera, semble-t-il, le premier à le conserver, soit comme surnom permanent, soit peut-être comme prénom devenu héréditaire. Si César n'en a pas fait vraiment un prénom, son fils adoptif, Auguste, affecte pourtant de le croire et, autant à titre d'héritage que parce qu'il a bénéficié de l'ovation de ses soldats dès la bataille de Modène, fait d'Imperator son prénom. Ce sera l'usage à peu près constant des empereurs. Comme, sous l'Empire, les commandements à titre personnel (autrement que comme légat, délégué de l'empereur) disparaîtront assez vite, l'empereur deviendra le seul à pouvoir triompher — fût-ce pour des succès remportés par d'autres en son nom — et à pouvoir être appelé imperator. À cela s'ajoutera la théorie qui voudra que parmi les citoyens, dans la vie civile, l'empereur soit le premier (princeps, prince), mais qu'en face de soldats il soit le commandant en chef, imperator. Le terme d'imperator en viendra tardivement à désigner la fonction d'empereur. Il est à l'origine du mot français « empereur ».

— Jean-Claude DUMONT

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