IMPRIMERIE
Le livre à la Renaissance
Le livre imprimé s'était lentement dégagé, au cours du xve siècle, de son modèle manuscrit. Cependant, cette évolution n'était pas entièrement accomplie en 1500. La typographie n'était pas encore normalisée et les caractères romains étaient rarement utilisés en dehors de l'Italie. De plus, la page de titre, en général, n'avait pas encore pris son aspect moderne.
La révolution typographique en Europe
Le triomphe de l'écriture romaine face aux écritures nationales dans toute une partie de l'Europe à partir des années 1530 s'explique d'abord par le prestige de son origine et par celui des lettres latines. Mais aussi par le fait que cette écriture était soutenue par une véritable idéologie. Si en effet la minuscule humanistique apparaît comme une construction bâtarde résultant de l'adaptation de l'écriture caroline par des lettrés de la fin du xive siècle et du début du xve siècle, artistes et calligraphes italiens, désireux d'atteindre une perfection qui ne pouvait être qu'unique, étudièrent avec passion les inscriptions antiques et s'efforcèrent, tel le fameux Luca Pacioli qui était proche de Léonard de Vinci, de déterminer mathématiquement les proportions idéales de la capitale romaine. Alde Manuce reste le principal initiateur de la révolution qui devait provoquer le triomphe de l'écriture ainsi conçue. On sait qu'il s'était associé au grand libraire Andrea Torresano di Asola qui avait repris le fonds de Nicolas Jenson. Il fit réaliser par un graveur de poinçons remarquable, Angelo Griffo, trois séries de caractères : des caractères grecs, des caractères romains et, enfin, les premières italiques connues qui servirent notamment à imprimer une série de textes classiques en format in-octavo, inaugurée par un Virgile en 1501.
Les caractères romains d'Alde apparurent pour la première fois dans le De aetnade Pietro Bembo (1495). Ils se caractérisent par un allégement des bas de casse, par une subtile répartition des pleins et des déliés et par la présence de plusieurs variantes pour certaines lettres, qui donnent aux pages imprimées un aspect aéré et harmonieux tout en leur conférant un éclairage inédit. Ils apparurent complétés et améliorés encore dans le célèbre HypnerotomachiaPoliphili(1499), grâce notamment à des capitales qui semblaient modelées sur les inscriptions antiques et dont les proportions délicates se conformaient aux leçons des théoriciens de la Renaissance italienne qui devaient trouver leur aboutissement dans le traité De divin proportionedu frère Luca Pacioli, publié précisément à Venise en 1509.
À partir de la fin du xve siècle, tandis que la mode des auteurs antiques se développait un peu partout, de grands libraires étrangers commencèrent à utiliser plus ou moins systématiquement le caractère romain. Il en alla ainsi à Bâle pour Amerbach, à Nuremberg pour Koberger et, un peu plus tard, à Paris pour Josse Bade. Il suffit cependant d'examiner les ouvrages édités par ce dernier pour mesurer le chemin qu'il restait à parcourir pour que le reste de l'Europe rattrapât l'Italie. Bade n'a pas abandonné le goût de l'écriture gothique qu'il juge mieux adaptée lorsqu'il s'agit d'inscrire en gros caractères les éléments les plus frappants du titre ou d'indiquer au haut des pages les titres courants. Il utilise de même volontiers encore des mises en page avec gloses et foliote ses ouvrages en chiffres romains. Cependant, Peter Schoeffer le Jeune et les graveurs bâlois qui dominaient le marché des caractères surent évoluer. Les ouvrages imprimés pour Érasme par Froben, successeur d'Amerbach, utilisent une lettre romaine inspirée de l'aldine et ont déjà une allure moderne. Par ailleurs, Peter Schoeffer le Jeune fut le premier à réaliser[...]
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Écrit par
- Isabelle ANTONUTTI : docteure en histoire culturelle, conservatrice en bibliothèque, responsable de formations et enseignante au Pôle Métiers du livre de l'université Paris-ouest-Nanterre-La Défense
- Jean-Pierre DRÈGE : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
- Henri-Jean MARTIN : professeur émérite à l'École nationale des chartes, directeur d'études à la IVe section de l'École pratique des hautes études
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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Médias
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