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IMPRIMERIE

Du plomb au numérique

1945-2000 : la convergence des technologies

Après le rythme effréné qu’a connu le siècle précédent, le début du xxe absorbe, perfectionne et intègre les différents procédés, mais le système technique fondé sur le plomb parvient à ses limites. La composition est à saturation. Les recherches s’orientent vers des techniques de composition photographique. La publicité, les brochures, les catalogues se multiplient, et l' héliogravure et l'offset sont particulièrement adaptés à leur reproduction. Mais l’offset est freiné par le passage au plomb. En effet, il est nécessaire de composer en plomb avant de tirer le typon, soit la pellicule photographique qui permet de graver chimiquement la plaque servant à l’impression.

La photocomposition de première génération de la marque Fotosetter est commercialisée en 1949. Il faut attendre plus d’une vingtaine d’années pour que s’opère une véritable révolution technique, lorsque les ateliers passent de la composition chaude (le plomb) à la composition froide (la photocomposition puis l’informatique). En France, deux ingénieurs en télécommunications, René Higonnet et Louis Moyroud mettent au point la Lumitype-Photon. Leur machine est conçue autour de deux techniques radicalement nouvelles : la photographie ultrarapide et le calcul binaire qui s’appuie sur un dispositif électromécanique. Le premier modèle flashe 29 000 signes par heure soit presque six fois la production horaire moyenne d'une linotype. Elle constitue une rupture profonde avec les techniques employées jusqu'alors en composition au plomb. Au lieu de fondre et d'assembler des centaines de milliers de lettres en plomb, c’est un faisceau lumineux qui projette une image latente sur un film recouvert d'une couche photosensible. Au lieu de stocker et de manipuler des tonnes de métal dans des ateliers de composition, un clavier pilote des systèmes électromécaniques. La première Lumitype est installée chez Berger-Levrault à Nancy en 1957. La photocomposition ne représente qu’une étape dans cette mutation. L’imprimeur perd son monopole avec la lente montée en puissance de l’équipement de bureau. La machine à écrire existe depuis la fin du xixe siècle, elle permet la réalisation de documents propres et lisibles. Les duplicateurs offset, ancêtre du photocopieur, sont accessibles à partir des années 1930.

L’histoire de l’imprimerie va se confondre progressivement avec celle de l'informatique dans une convergence des technologies. En 1965, le mini-ordinateur pilote un clavier, une imprimante, un terminal. La productivité des systèmes de composition explose quand les photocomposeuses ne sont plus réservées aux clavistes, mais quand elles deviennent des périphériques utilisables par les journalistes, les rédacteurs et les secrétaires. Le caractère d’imprimerie se dématérialise. En 1954, Adrian Frutiger met au point la première famille de caractères conçue pour la photocomposition : elle se nomme Univers. Il travaille pour la fonderie Deberny et Peignot, créée en 1748, qui a connu l’âge d’or de la fonderie au début du xxe siècle et dispose d’une typothèque remarquable. En 1976, le R.I.P. (Raster Image Processor) assemble les dessins et textes qui sont restitués sous forme d’image ; la page devient le cadre de composition. En 1983, la société Adobe lance le langage PostScript ; les éléments de la page sont traités comme une configuration de points ou de pixels. En 1985, la firme Macintosh annonce la microédition, qui bouleverse les méthodes de préparation des textes en facilitant le traçage, le dessin avec la souris qui donne de la maniabilité pour la mise en page. Le prépresse, c'est-à-dire l'ensemble des opérations de composition, de photogravure et de préparation de la forme imprimante, se voit profondément transformé avec la micro-informatique. Le bureau personnel empiète[...]

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Écrit par

  • : docteure en histoire culturelle, conservatrice en bibliothèque, responsable de formations et enseignante au Pôle Métiers du livre de l'université Paris-ouest-Nanterre-La Défense
  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
  • : professeur émérite à l'École nationale des chartes, directeur d'études à la IVe section de l'École pratique des hautes études
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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Médias

<em>Sūtra du Diamant</em>, IX<sup>e</sup> s. - crédits : British Library/ Science Photo Library/ AKG-Images

Sūtra du Diamant, IXe s.

Regiomontanus : Calendarium - crédits : Rosenwald Rare Book Collection/ Library of Congress, Washington, D.C.

Regiomontanus : Calendarium

Matrice de l'appareil typographique Garamond - crédits : Connaissances des Arts/ St-Genès/ AKG-images

Matrice de l'appareil typographique Garamond

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