INCULTURATION
Apparu en 1975 environ dans le vocabulaire de la missiologie chrétienne et, depuis 1977, dans les textes officiels de l'Église catholique, le terme d'inculturation répond au souci des missionnaires de prendre en compte la spécificité des cultures locales au lieu de leur imposer le modèle ecclésial des communautés européennes. Ce néologisme désigne une attitude qui s'apparente à l'« adaptation » (en anglais, accommodation), en ce sens que le missionnaire cherche à se rendre particulièrement attentif aux mœurs, mentalités et traditions des peuples auprès desquels il est envoyé et pour lesquels son message doit être intelligible. Mais l'inculturation diffère de l'adaptation de deux façons : d'une part, elle trouve son expression moins dans un effort particulier du missionnaire lui-même que dans la manière dont la culture — et, plus précisément, la communauté locale — s'assimile le message évangélique ; d'autre part, elle ne se limite pas à tenir compte, d'une façon plus ou moins accueillante, des aspects extérieurs de la culture rencontrée, mais vise à susciter des créations nouvelles au plus profond de celle-ci. Le modèle de l'inculturation aboutit donc à ce que le message évangélique se trouve enrichi en même temps que se l'approprient véritablement les cultures auxquelles il est ainsi proposé. Les théologiens tiennent, par ailleurs, à distinguer l'inculturation d'une simple « évangélisation des cultures », laquelle ne dépasse pas le processus d'acculturation, c'est-à-dire de la mutation provoquée dans une culture par le contact avec le christianisme. Ils font remarquer que, si chaque culture — chinoise, africaine, indienne... — a sa façon de comprendre et d'accueillir le message chrétien, il s'ensuit qu'elle est capable d'enrichir celui-ci en mettant en relief certains de ses aspects méconnus ailleurs. Dès lors, historiens et sociologues de la religon peuvent dire que, par cette nouvelle approche missionnaire, les hiérarchies chrétiennes renoncent à leurs traditionnelles vues centralisatrices (Rome, Cantorbéry, Genève...) au point d'admettre que la diversité manifestée par le processus d'inculturation exprime mieux la catholicité de cette Église qu'elles déclarent universelle en droit. Reste à savoir si le message chrétien n'est pas trop déterminé par sa toute première inculturation, celle qui lui a donné son caractère occidental, pour prendre des visages si radicalement nouveaux. Et si les gardiens, majoritairement européens, de son « identité » pourront lui consentir de si grands écarts.
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Écrit par
- Charles BALADIER : éditeur en philosophie, histoire des religions, sciences humaines; ancien élève titulaire de l'École pratique des hautes études
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Autres références
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- 1 073 mots
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