INDONÉSIE Histoire
Grands sultanats et Compagnie hollandaise des Indes (XVIIe-XVIIIe siècle)
Vers 1600, de nouveaux protagonistes entrent en scène. D'abord les Néerlandais : le premier voyage de Cornelis de Houtman date de 1596, la création d'une compagnie de commerce, la fameuse Compagnie des Indes orientales (la Vereenigde Oostindische Compagnie), de 1602, et Batavia fut fondée en 1619. Viennent aussi les Anglais, par les voyages de Francis Drake, de Thomas Cavendish, de James Lancaster, les Français, lors des expéditions de Beaulieu, et même les Japonais, que le nouveau gouvernement des Shogun poussera pendant quelques décennies vers les mers du Sud. Il faut signaler aussi le déclin du royaume de Vijayanagar, dernier État hindouisé de l'Inde du Sud : c'est la fin d'une culture à laquelle celle de l'archipel s'était longtemps nourrie. Désormais, le champ est libre pour l'islam. La première moitié du xviie siècle est marquée par une nette renaissance des sultanats indonésiens, qui connaissent à la fois un essor économique et un renouveau culturel.
Rôle des sultanats
Dans l'ouest de Sumatra, c'est l'apogée du sultanat d'Acéh, sous le règne du grand Iskandar Muda (1607-1636) ; ce nom de « Nouvel Alexandre » qu'il s'était donné par référence au Macédonien dont toute l'Asie méridionale cultivait alors la légende, ne paraît guère exagéré lorsqu'on mesure l'ampleur de ses conquêtes. Il parvint en effet à établir son autorité sur tous les comptoirs du nord et de l'ouest de Sumatra (Pidir, Pasai, Aru, Deli, ainsi que Barus, Tiku, Pasaman) et força à l'obéissance les princes malais de la péninsule : Johor, Pahang, Kedah, Perak. Il assiégea Malaka en 1629, et il s'en fallut de peu qu'il n'eût raison de l'ennemi héréditaire. Il instaura un monopole du poivre, veillant à ce que tout le trafic soit centralisé dans son port et n'hésitant pas à ravager les plantations de ses rivaux ; il pouvait ainsi imposer son prix à tous les marchands venus de Chine, d'Inde ou d'Europe. Après son successeur, Iskandar Thani, mort en 1641, le prestige d'Acéh déclina, et ce fut aux Néerlandais que revint l'ultime avantage de s'emparer de Malaka, que les attaques acihaises avaient affaiblie. Le centre de gravité du grand commerce quitta l'extrême ouest de l'archipel pour se reporter plus à l'est, à Java notamment.
À Java, les forces de l'intérieur, revivifiées au xvie siècle par les princes de Pajang, l'emportent à nouveau. Les souverains de Mataram, Senapati, puis Sultan Agung (1613-1645) unifient l'île peu à peu (prise de Pasuruhan en 1616, de Tuban en 1619). Soucieux de renouer avec l'ancienne splendeur de Mojopahit, Sultan Agung établit son autorité sur les comptoirs du Nord, sur Madura (1624), puis sur Bali (1639), et envoie même une expédition contre Sukadana, à Kalimantan (en 1622). Jambi et Palembang dépêcheront des ambassades à Mataram pour solliciter son alliance. Toutefois, de même qu'Acéh n'a pu venir à bout de Malaka, Mataram ne peut avoir raison de Batavia, cette forteresse construite par le Néerlandais Jan Pieterszoon Coen à l'ouest de l'île, près du petit port de Kelapa ; deux expéditions organisées à grands frais, en 1628 et en 1629, échouent coup sur coup. Mataram n'en figure pas moins comme la principale puissance de Java, et son souverain prend le titre de Susuhunan, que les Néerlandais traduiront par « empereur ». N'échappe guère à son autorité que le port de Banten, à l'extrémité occidentale de l'île où vit une importante colonie chinoise et où le commerce du poivre est très actif.
Dans les îles plus orientales, les Néerlandais signent un accord avec le sultan de Ternate (1607) et prennent pied non sans peine dans les îles Banda.[...]
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Écrit par
- Denys LOMBARD : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales
Classification
Médias
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