- 1. Les étapes techniques de l'industrialisation
- 2. La prépondérance de l'industrie : portée et limites
- 3. La troisième révolution industrielle, scientifique et technique
- 4. Les conditions économiques de l'industrialisation. La « société industrielle »
- 5. L'industrialisation à la périphérie du système capitaliste mondial
- 6. Bibliographie
INDUSTRIE Industrialisation et formes de société
L'industrialisation à la périphérie du système capitaliste mondial
L'industrialisation demeure l'apanage d'un nombre limité de pays. Ailleurs, dans le Tiers Monde, bien que des progrès industriels sensibles aient été réalisés, on ne peut véritablement parler d'industrialisation, celle-ci n'étant ni autocentrée, ni autodynamique et, partant, lente, chaotique, incohérente et inachevée.
L'accélération des rythmes de la croissance industrielle dans les pays développés d'Occident (qui sont de 5,6 p. 100 l'an, entre 1954 et 1966) a été accompagnée également d'une accélération certaine des rythmes de l'industrialisation à la périphérie : ces rythmes sont pour les pays sous-développés, et pour cette période, de l'ordre de 8,4 p. 100. Jamais dans l'histoire de l'Afrique, de l'Asie et de l'Amérique latine on n'avait encore vu de tels rythmes, qui, pour la première fois, dépassent ceux du monde occidental.
D'une manière générale, les taux annuels de croissance de l'industrie de transformation ont été, entre 1960 et 1967, de 6 p. 100 en Afrique, 7,2 p. 100 en Asie (Chine et Japon exclus), 5,5 p. 100 en Amérique latine et 18,8 p. 100 au Moyen-Orient. En Amérique latine, l'industrie de transformation fournit désormais de 15 à 30 p. 100 du revenu national ; en Asie, cette part a doublé et est maintenant de 15 à 20 p. 100, mais en Afrique elle reste inférieure à 10 p. 100. En 1970, les pays sous-développés, dans leur ensemble, produisent 65 p. 100 de leur consommation de produits manufacturés de consommation, 40 à 50 p. 100 de celle des biens intermédiaires et 20 à 30 p. 100 de celle des biens d'équipement.
Les rythmes de la croissance de la production d'énergie électrique ont été encore plus impressionnants : 11,5 p. 100 par an en Afrique, 12,5 p. 100 en Asie, 8,6 p. 100 en Amérique latine et 18,3 p. 100 au Moyen-Orient, comme ceux de la production d'acier qui ont été respectivement pour chacune de ces régions de 2,1, 8,5, 7,1 et 13 p. 100. Peut-on en conclure qu'on assiste actuellement au « décollage » de l'industrialisation du Tiers Monde ?
L'industrialisation de l'Occident a organisé le système capitaliste mondial en un centre dominant et une périphérie dominée. À chaque étape de l'évolution du capitalisme au centre correspondent, à la périphérie, des formes de spécialisation complémentaire, asymétrique, inégale, dans lesquelles la périphérie s'ajuste aux exigences du centre. C'est ainsi qu'à l'étape préindustrielle déjà la périphérie a joué un rôle essentiel dans l'accumulation du capital-argent au centre (la périphérie africaine fournissant à l'Amérique sa main-d'œuvre servile). À l'étape industrielle, au centre a correspondu jusqu'ici une spécialisation de la périphérie, la confinant dans la production agricole exotique d'exportation et, lorsque les coûts de transports intercontinentaux et la formation des monopoles l'ont permis, dans celle de produits miniers. Le développement du capitalisme à la périphérie a été, de cette façon, extraverti dès le départ. Le marché ainsi constitué à la périphérie sur la base de la production d'exportation a rendu possible à une étape tardive un début d'industrialisation par substitution de productions locales aux importations, cette industrialisation ayant été d'ailleurs financée principalement par le capital étranger.
Ce caractère extraverti d'origine rend compte des traits principaux du sous-développement contemporain : l'absence de structuration des industries qui restent largement complémentaires de celles du centre, non intégrées dans un ensemble national organisé (on dit encore des « industries d'enclaves »), et, en conséquence, l'inégalité persistante[...]
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Écrit par
- Samir AMIN : professeur de sciences économiques, directeur de l'UNITAR, Dakar (Sénégal)
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