INÉGALITÉS ÉCONOMIQUES (NOTION D')
Si, dans une société démocratique, « tous les citoyens naissent libres et égaux en droits », les inégalités de revenus, de patrimoine, de formation ou de conditions de vie y sont importantes. Dans son premier tome de De la démocratie en Amérique (1835), Alexis de Tocqueville pensait néanmoins que, dans ces sociétés, la tendance à l'égalisation des conditions était inéluctable, contrairement aux sociétés aristocratiques au sein desquelles la place de chacun est fixée selon sa naissance et demeure immuable. De fait, sur le très long terme – deux siècles –, les inégalités de revenu et de conditions de vie ont eu tendance à se réduire dans les sociétés industrielles, conformément à ce qu'on appelle la « courbe de Kuznets », du nom de l'économiste américain Simon Kuznets, Prix Nobel d'économie en 1971. Dans les années 1950, il avançait que les phases initiales de développement d'un pays sont d'abord marquées par une accentuation des inégalités, car les gains du changement sont accaparés par un petit nombre de gagnants, tandis que les perdants sont nombreux. Mais, lorsque le processus s'amplifie, la majorité finit par gagner et des politiques de redistribution peuvent être mises en place pour réduire les effets négatifs sur les perdants. Certains sociologues, comme Henri Mendras, ont même parlé de « moyennisation » de la société pour décrire ce phénomène de réduction des inégalités accompagné de l'essor des couches médianes. Mais cette « moyennisation » n'a supprimé ni la pauvreté ni les inégalités.
La pauvreté dans les sociétés riches
La pauvreté est le plus souvent mesurée en termes monétaires et désigne un revenu inférieur à un certain seuil, appelé seuil de pauvreté. Mais on peut également l'appréhender en mesurant le degré de privation à l'égard de certains biens ou services jugés essentiels dans la société moderne (dimension et confort du logement, possession de certains biens durables, accès à certains loisirs, alphabétisme, etc.) : c'est la pauvreté en condition de vie. Enfin, on parle parfois de pauvreté subjective pour désigner le fait que certains se considèrent comme pauvres, pour diverses raisons (difficultés budgétaires, endettement, etc.).
Aux États-Unis, le seuil de pauvreté est calculé à partir du prix d'un panier de biens alimentaires de base variable selon la taille des ménages et l’âge des personnes qui les composent. En 2011, le revenu de 15 p. 100 des habitants n'atteignait pas ce seuil. Dans l'Union européenne, le seuil de pauvreté est défini comme 60 p. 100 du revenu disponible médian, c'est-à-dire du revenu après impôts qui sépare la population en deux parties égales : une moitié gagne plus et l'autre moitié gagne moins. On tient compte de la taille des ménages en affectant à chaque personne un coefficient (appelé unité de consommation) correspondant aux dépenses supplémentaires auxquelles le ménage doit faire face pour maintenir son niveau de vie quand il s'agrandit d'une personne. Lorsque le revenu d’un ménage est divisé par le nombre d’unités de consommation dont il se compose, il est fréquent que le résultat soit désigné par l’expression « niveau de vie ».
Contrairement aux États-Unis, il s'agit d'un seuil de pauvreté relatif, puisque la référence évolue comme le revenu médian et non pas comme les prix. Ces deux façons très différentes de mesurer la pauvreté empêchent les comparaisons entre pays de part et d’autre de l’Atlantique. Néanmoins, en 2011, le revenu médian par ménage aux États-Unis s’établissait à 50 064 dollars. Or 25 p. 100 d’entre eux disposaient de moins de 25 000 dollars (50 p. 100 du revenu médian). On peut donc estimer que le niveau de vie de 25 p. 100 des ménages des États-Unis était, en 2011, inférieur au seuil de pauvreté[...]
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Écrit par
- Denis CLERC
: conseiller de la rédaction du journal
Alternatives économiques
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