- 1. Impérialisme et déficit d'État
- 2. Mondialisation et inégalités entre grandes régions du monde
- 3. La persistance des inégalités entre pays
- 4. Inégalité devant l'inégalité
- 5. Résurgence des inégalités devant l'emploi et les salaires dans les pays riches
- 6. Le rôle de la mondialisation des échanges et des institutions
- 7. Les problèmes de mesure des inégalités et de la pauvreté
- 8. Bibliographie
INÉGALITÉS Les inégalités économiques
Mondialisation et inégalités entre grandes régions du monde
Au-delà des facteurs historiques, la mondialisation est aujourd'hui très souvent accusée de creuser (ou tout au moins de contribuer à maintenir) les inégalités entre les différentes régions du monde. En privant les États-nations de marges de manœuvre monétaires et fiscales, la mondialisation rend sans doute possibles, au sein des pays, certaines formes de pauvreté et d'inégalité qui sinon pourraient être évitées. En réalité, comme le souligne Bourguignon, la mondialisation des échanges semble avoir eu des effets antagonistes sur les inégalités dans le monde. Elle a indéniablement favorisé un rattrapage des pays riches par les pays émergents, en particulier d'Asie de l'Est et d'Asie du Sud (régions du monde qui à elles seules compteront en 2015 3,4 milliards d'êtres humains, soit presque la moitié de la population mondiale). Depuis les années 1980, c'est dans ces régions qu'on observe, et de loin, les taux de croissance de la richesse moyenne par habitant les plus élevés du monde. Plus largement, la croissance mondiale actuelle est tirée par celle des pays en développement, et ce depuis le début des années 1990. Selon les institutions financières internationales, au cours de la décennie 1990-1999, la croissance annuelle du produit intérieur brut par habitant – en parité de pouvoir d’achat exprimée en dollars courants – a été de plus de 6 p. 100 dans les pays d'Asie de l'Est contre environ 3,5 p. 100 pour les pays occidentaux et 1,4 p. 100 pour l'Afrique subsaharienne. L'ouverture commerciale a permis des transferts de technologie et de savoir-faire des pays riches vers l'Asie en général et la Chine en particulier, dont les effets se ressentent sur les niveaux de vie moyens. Cette tendance s’est poursuivie au début des années 2000 et n’a pas été remise en question par la crise de 2008. Même la croissance annuelle du P.I.B. par tête du continent africain est restée plus rapide que celle des pays riches depuis 2008 (environ 3,2 p. 100 contre 1,6 p. 100). En revanche, la mondialisation semble avoir moins profité aux pays d'Amérique du Sud, fort hétérogènes, dont le P.I.B. moyen par tête a crû annuellement de « seulement » 3,0 p. 100 sur la décennie 1990 et de 2,4 p. 100 depuis 2008. Ces pays ont souffert de crises de change à répétition, dont les effets récessifs ont fini par déstabiliser en profondeur leurs sociétés. L'origine de ces crises monétaires se trouve sans doute en partie dans une ouverture trop rapide de ces pays aux flux de capitaux internationaux. Il est clair qu'une mondialisation financière moins brutale aurait permis à ces pays de mieux profiter des investissements en provenance des États-Unis ou d'Europe. Le grand pays émergent du continent qu’est le Brésil tire néanmoins son épingle du jeu.
Au total, à partir des années 1980, les inégalités entre pays décroissent fortement tandis que les inégalités au sein des économies se remettent à croître dans une bonne moitié de pays, parfois de manière spectaculaire comme aux États-Unis, mais à l’exception notable du Brésil, par exemple, qui connaît depuis une dizaine d’années une baisse historique du niveau des inégalités nationales. Les écarts de niveaux de vie dans le monde demeurent néanmoins considérables.
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Écrit par
- Charlotte GUÉNARD : maître de conférences en économie à l'Institut d'étude du développement économique et social, luniversité de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
- Éric MAURIN : chercheur en économie et statistique, administrateur I.N.S.E.E.
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