INFORMATIQUE Histoire
Les années 1960-1970 : les constructeurs font la loi
On dispose donc, au début des années 1960, de machines spécialisées dans les opérations d'« entrées-sorties » (input-output), selon l'expression consacrée. Elles peuvent exécuter des opérations de lecture et d'écriture sur des cartes perforées (un souvenir de la mécanographie), sur des bandes de papier perforées (un souvenir de la télégraphie), sur des bandes magnétiques (un souvenir des premiers magnétophones) ou sur des disques (un souvenir des gramophones). Des imprimantes, mais bruyantes, encombrantes et lentes, permettent d'obtenir des états imprimés à peu près lisibles. Côté pilotage de l'ensemble, les premiers écrans vidéo apparaissent pour afficher des informations en clair (ou presque) et non plus des vues plus ou moins compliquées de sorties d'oscilloscopes.
Par parenthèse, et aussi surprenant qu'il paraisse, on s'aperçoit que l'informatique, au moins à ses débuts, n'est pas un domaine d'innovation : elle emprunte ses lampes à la radio, ses transistors à l'industrie spatiale, ses écrans à la télévision, ses périphériques à diverses autres disciplines... C'est une industrie qui ne crée pas vraiment les outils de son développement, se contentant de détourner les objets issus des efforts innovateurs des autres secteurs industriels. Il semble bien que l'informatique s'impose d'abord comme une industrie d'inspiration typiquement libérale, caractérisée en effet par : l'exploitation de besoins plus suscités que réels ; une explosion de modèles et de familles de machines, uniquement justifiée par des raisons de stratégie d'occupation de marchés ; une recherche avant tout appliquée, s'insérant dans une logique prioritaire de profit à court terme. Dès lors, on assemble, on exploite plutôt qu'on n'innove. Pour illustrer cela, on rappellera que la première tentative de commercialisation d'ordinateurs fut un échec (Mauchly, Univac-I, en 1951), parce que la prouesse technologique avait été privilégiée au détriment de la stratégie de marché. I.B.M., qui se lança tardivement dans la course, sut parfaitement intégrer la dimension commerciale de l'affaire. Jusque dans les années 1960, avec la série 360, et mis à part le 1401 et ses dérivés, les succès de cette firme furent plus commerciaux que technologiques.
Mais la technologie, alors, dépasse la plupart des utilisateurs. En dépit de la mise au point de langages de haut niveau, comme le Fortran ou le Cobol, élaborés par des comités composés de représentants d'usagers et de constructeurs, la connaissance des éléments clés du traitement de l'information échappe à beaucoup d'utilisateurs. En outre, les machines exigent un entretien assez suivi, ce qui fait que les constructeurs profitent largement d'un marché à la fois captif (pour des raisons d'ordre technique) et en pleine expansion. C'est ainsi qu'on installe chez les clients des équipements souvent surdimensionnés, inadéquats ou peu fiables. Sans parler de la totale incompatibilité des machines, non seulement d'un constructeur à l'autre, mais aussi, souvent, entre machines d'une même société. C'est le cas par exemple de la série 1400 d'I.B.M. qui nécessita le développement de systèmes spéciaux de simulation et/ou d'émulation des autres produits d'I.B.M., comme les séries 707x, 709x, 708x, etc.
Telle est, dans ses grandes lignes, la situation de l'informatique en Europe et aux États-Unis jusqu'à la conjonction de deux événements cruciaux, vers les années 1980 : l'apparition du micro-ordinateur, et la fin de l'ère des ordinateurs dits de troisième génération.
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Écrit par
- Pierre GOUJON : mathématicien
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Média
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