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INGRES et L'ILLUSION GRECQUE. INGRES ET L'ANTIQUE (expositions)

Deux expositions, l'une à Paris, l'autre à Montauban et en Arles, ont ramené en 2006 « Monsieur Ingres » sous les feux de l'actualité, sans qu'il ait été besoin pour cela d'une quelconque date anniversaire. On ne peut que s'en féliciter, tant le calendrier des manifestations culturelles tend à devenir purement commémoratif, au risque d'une trop grande planification de la recherche et des publications afférentes, les éditeurs ne paraissant plus vouloir s'engager qu'à la faveur d'un « événement ».

La première avait adopté le format traditionnel de la rétrospective monographique (Ingres, 1780-1867, Paris, Louvre, 24 février-15 mai 2006). Le très riche fonds du Louvre avait été naturellement mis à contribution, mais était renforcé par une suite de prêts exceptionnels, qui permettaient ainsi de voir des œuvres presque jamais ou, pour certaines, très rarement montrées. Peu nombreuses étaient les œuvres connues manquant à l'appel, à l'exception notable du Martyre de saint Symphorien, resté à Saint-Lazare d'Autun où le retiennent, semble-t-il, de délicats problèmes de conservation. Ce somptueux rassemblement apparaissait en réalité comme la principale justification de l'exposition, dont le parcours était là encore, de manière très classique, principalement fondé sur la chronologie, avec quelques séquences thématiques appuyées principalement sur les dessins. Certains thèmes auraient pu être davantage développés ou approfondis, notamment la question de la peinture religieuse. Il est vrai que les commissaires avaient à prendre en compte des contraintes d'espace redoutables. À partir du moment où l'exposition ne se tenait pas au Grand Palais, comme à l'accoutumée, mais au Louvre même, elle ne pouvait se déployer que dans les salles dites « sous la Pyramide » (en fait la cour Napoléon). L'accrochage était ainsi très voire trop dense, à la limite de la sécurité pour les œuvres compte tenu du nombre de visiteurs, et ne permettant pas toujours le recul nécessaire. Gros succès public, à la suite de celui de l'exposition Girodet qui l'avait juste précédée, cette exposition ne manifestait-elle pas finalement surtout la volonté d'indépendance du Louvre et son souci d'être, aussi, face au musée d'Orsay, un musée du xixe siècle ?

Très différente d'esprit et de présentation était l'autre grande exposition Ingres de l'année 2006. Moins « médiatique » sans doute elle se révélait la plus passionnante et la plus novatrice quant à l'analyse et l'interprétation de son œuvre, et de son art (L'Illusion grecque. Ingres et l'Antique, Montauban, musée Ingres, 15 juin-15 septembre 2006 ; Arles, musée de l'Arles et de la Provence antiques, 2 octobre 2006-2 janvier 2007). Elle s'appuyait en effet sur d'impressionnants travaux de recherche, en particulier l'identification précise des sources d'Ingres, au travers des milliers de relevés sur calque faits par lui d'après l'Antique, en particulier les céramiques grecques, et conservés à Montauban. L'exposition permettait de croiser in situ le travail de documentation d'Ingres, les objets qu'il copia, et certaines de ses œuvres qui en furent plus ou moins lointainement inspirées. Le contexte général était à chaque fois imposé par le musée d'accueil : on était ainsi plus chez Ingres à Montauban, plus chez les Grecs et les Romains en Arles. Mais, dans l'un et l'autre cas, on découvrait la présence permanente de l'antique chez Ingres, non de manière générale, mais au cas par cas, rentrant ainsi dans l'intimité de sa réflexion et de sa création. Toute son œuvre était ainsi revisitée. On retiendra surtout deux cas exemplaires, celui de Stratonice, ou La Maladie[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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