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INNOVATION

Des processus complexes et dynamiques

Le développement des modèles de l'« innovation en grand » et de la « big science » ne signifie pas pour autant la disparition de logiques et de sources d'innovation plus « entrepreneuriales ». L'hypothèse la plus vraisemblable est que ces différents modèles non seulement ne s'excluent pas mutuellement, mais se complètent et, plus fondamentalement, s'inscrivent dans une nouvelle dynamique organisationnelle et stratégique de l'innovation sous forme d'arrangements plus « collectifs » ou multilatéraux d'acteurs très variés plus ou moins interdépendants, souvent complémentaires, et parfois concurrents. De fait, les logiques collaboratives tendent désormais à primer sur les modes traditionnels d’organisation, souvent cloisonnée, « individuelle », des activités de recherche, d’innovation et de valorisation.

Des modèles complémentaires et imbriqués

Les modèles d'organisation de l'innovation semblent coexister assez naturellement, voire s'interpénétrer. Plusieurs arguments vont clairement dans le sens de cette hypothèse. Premièrement, les études empiriques (Cohen et Levin, 1989) échouent à démontrer de manière concluante que la propension à s'engager dans des activités de R&D ou à innover soit clairement corrélée à la (grande) taille des firmes ou au degré de concentration des marchés.

Deuxièmement, les études tendent aussi à remettre en cause l'opposition classique depuis les années 1960 entre les modèles demand pull (innovation tirée par des consommateurs considérés comme « souverains ») et ceux technology push (innovation organisée à grande échelle et impulsée par la science). Le premier modèle, en phase avec l'approche entrepreneuriale de l'innovation, reste ambigu, voire indéterminé, au niveau empirique comme sur le plan théorique, vu notamment l'influence considérable que les grandes firmes exercent sur le comportement des consommateurs au travers des multiples canaux de promotion et de publicité ou de la création pure et simple de « nouveaux besoins ». Qu’on pense, par exemple, à la force de frappe marketing et commerciale à l’échelle mondiale des grandes marques américaines, japonaises ou encore sud-coréennes, dans les domaines d’Internet, du multimédia et des loisirs. Le second modèle semble mieux refléter les caractéristiques essentielles du capitalisme contemporain, notamment au niveau de la concentration et du pouvoir des firmes sur les marchés ; les exemples abondent : duopole mondial bien établi d’Airbus et de Boeing dans l’aéronautique civile, quasi monopole de Microsoft dans les systèmes d’exploitation et les principaux logiciels d’application, oligopole très puissant des grands laboratoires pharmaceutiques ou des géants de l’énergie, etc. Il reste cependant problématique car il ne permet pas d'expliquer pourquoi certaines innovations importantes (comme le microprocesseur, le micro-ordinateur, ou encore les multiples applications des télécommunications mobiles et d’Internet) ont été introduites, pour beaucoup d’entre elles, en dehors des structures de R&D des grandes firmes.

L'analyse fine de plusieurs secteurs importants (notamment ceux des technologies de l'information et de la communication et des sciences de la vie) montre que la dynamique d'innovation qui les caractérise depuis les années 1970 s'appuie de manière significative sur une multitude de jeunes entreprises (start-up) extrêmement pointues en matière de nouvelles connaissances et compétences. Ces jeunes sociétés, qui sont parfois devenues des leaders mondiaux en une décennie, s'avèrent très actives dans la mise au point de nouveaux procédés, produits et services, et davantage encore dans la transformation des structures des marchés traditionnels et la création de nouveaux marchés. Cela a[...]

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Écrit par

  • : professeur des Universités, directeur adjoint du département Aménagement de l'École polytechnique de l'université de Tours

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Média

John Kenneth Galbraith - crédits : Bachrach/ Getty Images

John Kenneth Galbraith

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