INÖNÜ ISMET PACHA dit ISMET (1884-1973)
Compagnon d'armes de Mustafa Kemal, Ismet Inönü fut l'un des grands bâtisseurs de la Turquie moderne. Né à Smyrne, fils d'un employé du ministère de la Justice qui voulait faire de lui un juriste, Inönü préfère entrer à l'école d'artillerie d'Istanbul et en sort diplômé en 1906. D'abord affecté à Edirne, il est rapidement promu membre de l'état-major de la IVe armée. En 1909, il fait partie du mouvement des Jeunes-Turcs, favorable aux réformes et à la liquidation du pouvoir impérial du sultan Abdülhamid II. En 1910, il est affecté au corps expéditionnaire, chargé de réprimer les rébellions arabes de l'Empire turc, est envoyé au Yémen en 1912 et, un an plus tard, se trouve sur les frontières occidentales de l'Empire, où se déroule la guerre entre la Ligue balkanique (Grèce, Bulgarie, Serbie et Monténégro) et la Turquie. Pendant la Première Guerre mondiale, alors que son pays est l'allié de l'Allemagne, il se bat successivement contre les Anglais en Palestine, puis en 1916, dans l'est de la Turquie contre les Russes. Promu dans le haut commandement à la fin de la guerre, il est nommé au sous-secrétariat de la Guerre ; il entre alors en contact avec le mouvement nationaliste de Mustafa Kemal. En 1920, lors de l'invasion de la Turquie par la Grèce, Ismet Inönü est encore sur le champ de bataille, où il dirige la résistance turque. C'est en mémoire de ses succès militaires qu'il reçoit d'Atatürk le nom d'Inönü (nom d'un village où se déroula un combat décisif pour l'indépendance de la Turquie). En 1920, il est élu député d'Edirne. Ministre des Affaires étrangères en 1922, il fait sa première apparition sur la scène internationale lors de la Conférence de Lausanne ; un an plus tard, il obtient de la Grande-Bretagne la garantie de la souveraineté nationale turque. Lors de la proclamation de la République, le 29 octobre 1923, il devient Premier ministre. Durant quatorze ans, Mustafa Kemal et Inönü travaillent ensemble à la révolution politique et sociale qui fera sortir la Turquie de l'état féodal. En 1927, Inönü quitte l'armée avec le grade de général et se consacre à l'administration et à l'application des réformes. Il intervient dans la politique étrangère et cherche à établir des relations cordiales avec les pays voisins. En 1936, il négocie le contrôle, par la Turquie, des détroits (Bosphore et Dardanelles). Plus modéré qu'Atatürk, tant sur le plan politique que dans sa vie privée, en 1937, il entre en désaccord avec celui-ci et abandonne ses fonctions de Premier ministre. À la mort d'Atatürk (1938), l'Assemblée nationale, que contrôle le tout-puissant Parti républicain du peuple (P.R.P.), le choisit comme président de la République. Pendant douze ans, il poursuit l'œuvre du « Père des Turcs ». Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il préserve la neutralité de la Turquie, et ne rallie la cause des forces alliées qu'en 1945. Comme son prédécesseur, il fait preuve d'autorité. Bien que favorable aux réformes, il considère que la Turquie n'est pas prête pour un type de démocratie à l'européenne. Pendant la guerre, afin d'éviter toute opposition à sa politique, il n'autorisera l'existence que du seul P.R.P. ; Ce n'est qu'en 1946, lors des élections législatives, que le Parti démocrate de Bayar et Menderes peut présenter des candidats. Toutefois, en 1950, le parti d'Inönü perd le contrôle de l'Assemblée, le Parti démocrate sort vainqueur des élections. La Turquie sent souffler un vent de libéralisme : la voie kémaliste est progressivement abandonnée. Le nouveau président Celâl Bayar et le Premier ministre Adnan Menderes se font les champions de la libre entreprise et du capitalisme privé. Ismet Inönü[...]
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Écrit par
- Jean-Charles BLANC : diplômé de l'École des langues orientales, journaliste
Classification
Média
Autres références
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ECEVIT BÜLENT (1925-2006)
- Écrit par Ali KAZANCIGIL
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Homme politique turc, Bülent Ecevit est aussi poète et critique d'art. Taxé de rêveur par ses adversaires, il se révèle être un redoutable tacticien. Il écrit des poèmes exaltant l'amitié gréco-turque, mais n'hésite pas à envoyer ses armées envahir la moitié de Chypre et...
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TURQUIE
- Écrit par Michel BOZDÉMIR , Encyclopædia Universalis , Ali KAZANCIGIL , Robert MANTRAN , Élise MASSICARD et Jean-François PÉROUSE
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...octobre 1923 fut proclamé l'avènement de la République turque, dont Mustafa Kemal fut aussitôt élu président ; il désigna son principal lieutenant, Ismet Inönü, comme président du Conseil des ministres. La capitale du nouvel État fut fixée à Ankara. Enfin, le 3 mars 1924, fut votée l'abolition du ...