INTERACTIONS (physique) Interaction nucléaire faible
La théorie électrofaible
Construite sur le modèle de l’électrodynamique quantique, la théorie moderne des interactions nucléaires faibles, proposée en 1967 par Steven Weinberg (1933-2021) et Abdus Salam (1926-1996), les décrit comme dues à l'échange de « bosons intermédiaires » appelés W+, W– et Z0. Aux courants chargés du modèle de Fermi, cette théorie ajoute des « courants faibles neutres » transmis par le boson Z0 et aptes à créer une paire neutrino-antineutrino. En 1973, l'observation au Cern (Genève) de la diffusion élastique de neutrinos confirme cette prédiction. La découverte expérimentale des bosons W et Z0,dans les années 1980, constitue pour un temps un argument décisif en faveur de la pertinence de cette théorie, comme le sont de multiples mesures de précision dans les désintégrations de certains hadrons. On comprend ainsi que les masses élevées des particules W et Z (presque 100 fois supérieures à celle du proton) sont la cause de la faiblesse de la portée de l'interaction faible. L'idée de base de cette théorie est de considérer l'électron et le neutrino comme deux états d'un doublet d'« isospin faible ». L'idée physique sous-jacente est que ce qu'on appelle en un point de l'espace « neutrino » ou « électron » est arbitraire et que la mesure d'un effet d'interaction faible ne dépend pas d'une telle convention. Un tel principe de symétrie fonde ce qu'on appelle les théories de jauge locale. Le groupe mathématique qui correspond à une telle symétrie est le groupe SU(2).
Cette construction théorique permet d'unifier l'électromagnétisme et l'interaction faible en une seule théorie dite « électrofaible ». En termes mathématiques, cela signifie que la théorie unifiée admet un groupe de symétrie locale qui contient les deux sous-groupes SU(2) et U(1). Le modèle de Weinberg et Salam choisit le groupe produit SU(2) × U(1). SU(2) et U(1) admettent pour « représentations » des particules médiatrices des forces, respectivement le triplet (W+,W–,W0) et le singlet (B). Le photon (noté γ) est une superposition des deux éléments électriquement neutres, W0 et B, tandis que la superposition qui lui est « orthogonale » est appelée Z0, selon les équations de mélange :
Γ = B cos θ + W0 sin θ ; Z0 = –B sin θ + W0 cos θ.
Les mesures expérimentales montrent que l'angle de mélange θ (appelé angle de Weinberg) vaut 29 degrés environ. De 1989 à 2000, l'analyse fine des caractéristiques des bosons Z0 produits au grand collisionneur électron-positron LEP du Cern permet de vérifier de nombreuses prédictions de la théorie électrofaible avec une grande précision. Pour élucider le fait que les bosons W et Z0 sont massifs (contrairement au photon), la théorie électrofaible suppose qu'un mécanisme, dit de « brisure spontanée » de la symétrie, met en jeu un nouveau champ élémentaire – appelé champ de Higgs, du nom du physicien écossais Peter Higgs (1929-2024) – aux propriétés paradoxales. Les expériences du collisionneur de protons LHC (Large Hadron Collider) installé dans le tunnel du LEP permettent de détecter, en 2012, un boson associé à ce champ, et donc appelé « boson de Higgs ».
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Écrit par
- Bernard PIRE : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau
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