INTRODUCTION À L'ÉTUDE DE LA MÉDECINE EXPÉRIMENTALE (C. Bernard)
Réception de l’œuvre
Dès sa publication, l’ouvrage est l’objet de malentendus entre son auteur et le public auquel il est destiné : jeunes médecins, collègues scientifiques non physiologistes et public féru de culture scientifique, avisé et instruit. Même si Claude Bernard se défend de vouloir suivre les pas de son ami chimiste Chevreul sur le terrain de la philosophie des sciences, son œuvre suscite l’analyse philosophique et l’intérêt du monde littéraire. La presse médicale ne relate pratiquement pas la publication de l’Introduction. Pourtant son auteur veut faire la démonstration que la physiologie expérimentale pratiquée chez les animaux est un élément nécessaire et primordial des progrès de la médecine et de la pratique de la médecine expérimentale dans les hôpitaux, même s’il concède un intérêt à la clinique et à la médecine empirique.
Bernard entend fournir une « solution scientifique » à la « médecine expérimentale ». Ce projet n’est en réalité pas nouveau puisqu’il reprend celui de Magendie, l’expression de « médecine scientifique » étant d’ailleurs déjà utilisée dès 1755. Ce que Bernard propose n’est pas simplement l’utilisation de l’expérimentation en biologie et l’abandon des théories médicales, mais une alliance nouvelle et originale entre hypothèses, théories d’un côté, et faits de l’autre. Ce schéma expérimental est grosso modo celui de son ami Chevreul. Mais l’originalité de Claude Bernard tient en particulier à l’importance primordiale accordée au « fait » expérimental auquel on doit soumettre l’hypothèse, et qui est l’acte matériel du phénomène dont l’expérimentateur maîtrise les conditions déterminant son apparition ( le déterminisme de Claude Bernard).
Les meilleurs critiques de l’Introduction sont ses élèves qui en ont souligné l’importance et relevé les limites en atténuant surtout le lien entre déterminisme et vérité (le phénomène déterminé dans le laboratoire n’est pas le phénomène naturel) et en faisant du déterminisme une simple condition nécessaire d’apparition du phénomène. Mais le déterminisme en tant que causalité reste un concept central, même s’il devient relatif.
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Écrit par
- Jean-Gaël BARBARA : neuroscientifique, directeur de recherche CNRS
Classification
Média