INVESTIGATIONS PHILOSOPHIQUES, Ludwig Wittgenstein Fiche de lecture
Perception, aspects, expérience
La seconde partie des Investigations est consacrée à des questions qui paraissent distinctes de la première. Wittgenstein y aborde des problèmes relatifs à la perception, aux aspects, à l'expression et plus généralement à des « expériences » qui orientent la réflexion vers des notions psychologiques auxquelles il attachera une importance particulière pendant les dernières années de sa vie. Cette discontinuité entre les deux parties du livre trouve sa source dans un choix d'édition peut-être contestable. Toutefois, cette seconde partie est reliée par des rapports étroits à la première. En s'intéressant comme il le fait aux aspects (voir une figure tantôt comme un lapin, tantôt comme un canard, par exemple), à l'expression ou aux « expériences » dont les mots, voire la signification, sont apparemment l'objet, Wittgenstein s'attaque à des questions qui lui permettent d'étendre les analyses consacrées aux règles ou au rôle des règles. L'examen de ces questions offre notamment la possibilité de clarifier plusieurs fonctions ou dimensions du langage qui en font éminemment partie, et grâce auxquelles il est permis de mettre en lumière son rôle dans une vie humaine, partagée autant qu'individuelle. Sous ce rapport, les remarques qui composent la seconde partie des Investigations ouvrent la voie aux réflexions sur la philosophie de la psychologie ; elles constituent une avancée dans un travail qui mobilisera notamment l'attention de leur auteur entre 1946 et 1949, et qui le conduira à explorer le champ des « concepts psychologiques », qui, en se conjuguant aux verbes comme penser, sentir, percevoir, etc., sont au cœur des présuppositions de la psychologie et de nos conceptions de la cognition. Leur importance tient à la fois aux compléments qu'elles offrent à la philosophie des jeux de langage (dont elles conservent en fait les éclairages) et aux perspectives qu'elles ouvrent pour une philosophie de l'esprit différente de celle qui s'est développée depuis peu en se démarquant de l'intérêt accordé au langage. Il est remarquable que sur ces différents points la visée thérapeutique de Wittgenstein débouche parfois sur des éclairages ou des idées qui excèdent de beaucoup une inspiration exclusivement critique et négative.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean-Pierre COMETTI : professeur honoraire des Universités
Classification
Média
Autres références
-
LANGAGE PHILOSOPHIES DU
- Écrit par Jean-Pierre COMETTI et Paul RICŒUR
- 23 538 mots
- 9 médias
C'est la tradition deInvestigations philosophiques plutôt que celle du Tractatus qui domine les travaux de l'école d'Oxford dans la période ici considérée. On peut rattacher à cette tradition les textes de J. L. Austin († 1960) consacrés aux « excuses » (in Philosophical... -
WITTGENSTEIN LUDWIG (1889-1951)
- Écrit par Jean-Pierre COMETTI et Gilles Gaston GRANGER
- 4 196 mots
- 3 médias
Dans les deux œuvres achevées qu'a laissées Wittgenstein, on a souvent voulu reconnaître deux philosophies successives et radicalement distinctes. En fait, ce sont les difficultés mêmes déjà présentes, et reconnues par lui, dans le Tractatus qui constituent le point de départ d'une élaboration...