IRAN Cinéma
La découverte récente du cinéma iranien a pour origine l'issue du conflit Iran-Irak en 1988. Soucieux de normaliser ses relations avec l'étranger, le pays ouvre ses frontières et accepte que certains films soient montrés. En 1989, Où est la maison de mon ami ? d'Abbas Kiarostami reçoit le léopard d'or au festival de Locarno. Quelques années plus tard, Cannes attribue la palme d'or au Goût de la cerise (1997), du même metteur en scène, permettant ainsi au cinéma iranien de ces dernières années d'accéder à la reconnaissance internationale. Derrière cette politique d'ouverture savamment contrôlée, il ne faut pas oublier que, tout au long de son histoire, du régime du shah jusqu'à la révolution islamique, le cinéma iranien a traversé des moments difficiles, avec pour conséquence le frein mis à son développement industriel et artistique, en raison d'une censure propre à décourager toute initiative personnelle.
Les longs débuts du cinéma iranien (1900-1969)
Lors de son séjour en France pour l'exposition universelle de 1900, le shah Mouzaffer al-din, séduit par le cinématographe, fait acheter une caméra avec laquelle on filme en 1901, à son usage exclusif, des scènes de rue. Le cinéma conserve longtemps ce statut de divertissement d'amateur, privilège du pouvoir en place. On tourne des actualités dans les années 1920 et le premier film de fiction, Abi et Rabi, est réalisé en 1930 par un Arménien, Avanes Ohanian. L'expérience reste sans suite car la première œuvre parlée en persan, La Fille de Lorestan, film historique sur le héros national Djaffar, est réalisée en 1933 à Bombay par Ardeshir Marwan Irani (1886-1969), d'origine iranienne, d'après une histoire écrite et interprétée par un jeune poète, Abdolhosein Sepanta (1907-1969), exilé en Inde. Le succès du film incite ce dernier à continuer. Il réalise Les Yeux noirs (1934), Layli et Majnun (1935), les Roméo et Juliette de la tradition persane, ainsi que Firdousi, biographie du grand poète épique du xie siècle. De retour en Iran en 1936, Sepanta tente d'y lancer une production cinématographique mais échoue. Le régime du shah se méfie du cinéma et ne fait rien pour l'encourager, tandis que des groupes religieux font pression sur le pouvoir pour freiner l'implantation des salles.
C'est seulement en 1947 qu'on tourne en Iran le premier film parlant, La Tempête de l'existence. Esmaïl Kushan, un distributeur et exploitant qui a investi ses bénéfices dans la production, en est à l'origine. Il produit quatre films entre 1947-1951, dont Charmessar, histoire d'une paysanne devenue chanteuse de radio, film musical à la croisée des productions de Bombay et des studios du Caire. Kuchan, qui va régner sur le cinéma commercial pendant trente ans, fait de nombreux émules. Ce cinéma d'évasion, composé de mélodrames, de films policiers et de comédies, est un médiocre plagiat des films occidentaux, selon la méthode qui prévaut dans l'industrie de Bombay. Toute tentative vers un autre cinéma est alors contrée. Pour preuve, Le Sud de la Ville (1958) de Farrokh Gaffary, tourné en décors naturels, qui décrit la vie des quartiers populaires. Cette ébauche de néo-réalisme subit plusieurs coupes de la part de la censure. À peine distribué, la préfecture de police retire au film son visa. Le cinéaste se dirige alors vers la comédie avec Qui est la mariée ? puis un conte macabre, La Nuit du bossu (1963), l'allégorie se révélant le seul moyen d'expression original, face à une censure qui refuse un cinéma de témoignage social d'inspiration réaliste.
Dans ce contexte, le remarquable film de la poétesse Forough Farrokhzad La maison est noire (1963), moyen-métrage documentaire tourné dans une léproserie, fait figure d'exception. Il fut remarqué à l'époque par Chris Marker,[...]
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Écrit par
- Charles TESSON : critique de cinéma, maître de conférences en histoire et esthétique de cinéma, université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
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