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ISABEAU DE BAVIÈRE (1371-1435) reine de France

Fille d'Étienne II, duc de Bavière, et de Tadea Visconti. Mariée en 1385 au roi de France Charles VI, dont la tante, Isabelle, fille de Jean le Bon, avait épousé en 1360 le duc de MilanJean-Galéas Visconti. Isabeau de Bavière joua certainement un rôle déterminant dans le mariage du jeune Louis d'Orléans, frère de Charles VI, avec Valentine Visconti, la propre fille de Jean-Galéas et d'Isabelle de France (1389). Cela explique l'existence de relations étroites entre la reine Isabeau et son jeune beau-frère, relations que la voix populaire qualifia rapidement d'adultère. En fait, bien que devant en grande partie sa couronne à l'influence du duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, oncle du roi, c'est du côté de Louis d'Orléans qu'Isabeau se rangea tout d'abord lorsque les ducs commencèrent de s'affronter pour dominer le Conseil royal.

La folie du roi (la première crise eut lieu en 1392) plaça la reine dans une situation extrêmement difficile. Ses oncles et son beau-frère ne lui laissèrent aucun pouvoir, mais l'intervention de son frère, le duc de Bavière Ernest, qui résida longuement à Paris avec sa femme, fille de Bernabo Visconti, compliqua sérieusement l'imbroglio politique. La reine plaça des hommes à elle dans l'administration française, notamment quelques fidèles venus de Bavière, comme les Raguier. Un goût commun pour le luxe, les bijoux, les fêtes et la danse avait porté la reine vers Louis d'Orléans, mais l'assassinat de ce prince, perpétré alors qu'il sortait précisément de l'hôtel Barbette, où elle résidait à l'écart du roi fou, la priva d'appui : elle passa alors dans le camp et dans les bras de Jean sans Peur et se trouva, en 1413, obligée de faire face, à ses côtés, à une émeute, dont les meneurs, les Cabochiens, s'en prenaient à son entourage comme à tous ceux qui dévoraient le trésor royal. Le duc de Bavière fut même arrêté par les Parisiens insurgés, et Isabeau, comme Jean sans Peur perdant le contrôle d'un mouvement qu'il avait contribué à déclencher, dut composer avec les révoltés pour éviter le pire. La violence de la réaction des Armagnacs (1413-1418), provoquant l'exil de la reine à Tours en 1417, cimenta l'alliance d'Isabeau et de Jean sans Peur. Après l'assassinat de ce dernier (1419), la présence de la reine aux côtés du nouveau duc, Philippe le Bon, donna quelque apparence de légitimité aux tractations qui aboutirent à l'alliance anglo-bourguignonne et à la conclusion, en 1420, du traité de Troyes : Charles VI, sous l'influence de sa femme, déshéritait le futur Charles VII et faisait du roi d'Angleterre son héritier. En déclarant que son propre fils, le dauphin Charles, était bâtard, Isabeau sacrifiait son honneur aux combinaisons politiques.

La reine, veuve en 1422, vécut à Paris, sous la protection du gouvernement du régent Bedford et non sous celle du duc de Bourgogne, dans un isolement de plus en plus profond. Le peuple oublia presque son existence et les gouvernants la tinrent absolument à l'écart des affaires. À l'hôtel Saint-Paul, où elle était venue habiter dès la mort de Charles VI, sa maisonnée et son train de vie furent modestes.

Les jugements les plus sévères ont été portés sur une reine à laquelle on accorde beaucoup d'amants et sur une mère capable de renier son fils. Il faut néanmoins se souvenir que, mariée à quatorze ans et femme d'un fou à vingt et un, reine étrangère d'un royaume déchiré, aussi influente, un temps, que dépourvue de droits politiques réels, Isabeau de Bavière n'avait pas été préparée à des responsabilités politiques que nulle reine n'avait assumées en France depuis Blanche de Castille. Encore Blanche jouissait-elle, pour faire face aux ambitions des princes,[...]

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, directeur général des Archives de France

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