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ISLAM (La civilisation islamique) L'art et l'architecture

Les forces nouvelles venant d'Asie centrale (du XIe à la fin du XVe s.)

Les Saldjoukides (XIe et XIIe s.)

En tant qu'esclaves militaires, les Turcs firent tôt leur apparition dans l'empire arabo-islamique. Les premiers États turco-islamiques ne se constituèrent cependant qu'à partir de la fin du xe siècle (ce sont essentiellement les Qarakhanides, les Ghaznévides et, plus tard, les Saldjoukides). Les Saldjoukides, sunnites, s'installèrent à Bagdad en 1055 et établirent un vaste État strictement organisé dont le calife restait abbasside, donc arabe, dont la bureaucratie était iranienne et l'armée turque. Artistes et artisans appartenaient probablement aux trois groupes ethniques. À partir de 1071, les Saldjoukides prirent l'Anatolie, jusqu'alors byzantine, s'imposèrent au Proche-Orient et purent pénétrer jusqu'au Yémen et à Bahrein. Leur fortune militaire et politique a fondé leur gloire et a amené les historiens de l'art à surestimer leur rôle dans la création du langage artistique qui va dorénavant s'imposer – grâce à eux – dans le monde irano-turc et jusqu'au Proche-Orient arabe.

En effet, il n'est guère possible, actuellement, de différencier clairement les caractéristiques propres à l'art de chacun des centres du monde irano-turc au xie siècle. Dans toute la région, on construisait selon les techniques déjà rencontrées chez les Samanides à Boukhara. Les thèmes architecturaux qui semblent surgir ex nihilo au moment où les Saldjoukides prennent le pouvoir et qui vont déterminer l'architecture du Proche-Orient jusqu'au Penjab pendant les siècles à venir apparaissent en fait presque tous dès le début du xie siècle, sinon auparavant, aussi bien dans les régions saldjoukides que ghaznévides et qarakhanides. Ce sont essentiellement la cour à quatre iwans, la salle à coupole devant le mihrab (la maqsūra monumentale), le pishtāq et le minaret cylindrique dont les Saldjoukides et leurs alliés assurent la propagation vers l'ouest jusqu'en Anatolie et, de façon indirecte, jusqu'en Égypte.

Le décor architectural « saldjoukide » n'a pas davantage été inventé par la dynastie saldjoukide. Il suit de près certains schémas déjà vus dans les provinces orientales au xe siècle, notamment en ce qui concerne le décor en briques. Les revêtements de stuc reprennent et varient des formes dont on sent encore l'origine samarrienne et les accompagnent d'une floraison nouvelle d'arabesques (mosquée de Qazvin, mihrabs d'Ardistan).

Les frises polychromes, dues à l'utilisation de briques vernissées, vont renouveler dorénavant le décor architectural islamique. À partir de leur première apparition au minaret de Damghan (1058), elles ont une diffusion rapide et apportent, au xiie siècle, leurs touches de couleur aussi bien à l'arc de Bust en Afghanistan qu'au minaret de la Kutubiyya à Marrakech.

Les muqarnas, eux, connaissent une fortune plus extraordinaire encore. Ce sont ces motifs architecturaux en alvéoles, constitués par la juxtaposition de niches et de fragments de niches, qui décorent le plus souvent des surfaces courbes, de préférence en surplomb. Au Gunbad-i ‘Alī, à Abarquh, l'un des plus anciens exemples connus (1056), ils soutiennent la corniche ; des niches en céramique et en stuc, peut-être plus anciennes, qui sont probablement des muqarnas, ont été livrées par les fouilles de Nishapour. Les trompes tripartites (Tim) ont souvent été prises comme prédécesseur immédiat des muqarnas ; mais, si l'on ne peut nier la parenté des deux motifs, leur filiation n'est nullement certaine. Tous deux prennent sans aucun doute naissance au xie siècle dans le monde iranien ou irano-turc ; toutefois, nous trouvons des muqarnas dans presque tout le monde islamique dès la première moitié du xii[...]

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Écrit par

  • : professeure d'histoire de l'art et d'archéologie islamiques à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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